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Charles TESSIER (ca 1550 - ?)
Carnets de voyages
Claire Lefillâtre (soprano),
Bruno le Levreur (haute-contre),
Jan va, Elsacker (ténor),
Arnaud Marzorati (basse).
Le Poème Harmonique
Direction : Vincent Dumestre
Enregistrement du 28 octobre au 1er novembre 2005
à la chapelle Notre-Dame de Bon-Secours, Paris.
ALPHA 100 (1 CD 59 minutes)
Parcours fusionnel
Alpha
fête son centième disque, évidemment, en compagnie
de Vincent Dumestre, lui qui signa avec Castaldi le numéro un
d’un label exigeant et inventif. Au fil des univers que propose
le Poème Harmonique, les critiques dithyrambiques deviennent
presque une habitude… Alors on se dit que cette fois, on
résistera, qu’on ne se laissera pas anesthésier par
la béatitude habituelle, et qu’on trouvera bien quelque
chose à redire à l’affaire. Peine perdue. Une fois
de plus, Dumestre et ses comparses nous font la totale. D’abord,
la bonne idée : suivre les pas de Charles Tessier, natif de
Pézenas, pas réels ou hypothétiques en Angleterre,
France, Lorraine, Allemagne, Italie, et Arabie. Bonne idée aussi
que d’explorer encore cette période de transition entre
fin 16ème et début 17ème siècle, et cet
équilibre fragile entre musique populaire et musique savante, la
seconde encore si proche de la première, airs de cour
côtoyant chansons populaires, luths s’accoquinant avec
bombardes et percussions, air à voix seul émergeant de
l’art polyphonique de la Renaissance. Art de transition qui
découvre encore des contrées lointaines synonymes de sons
nouveaux.
On pourrait ainsi détailler le contenu de ce trésor,
entre bransle de village ou de Lorraine, « chanson
suicesse » ou « turcquesque », air
espagnol ou anglais ou pavane … Exubérance, nostalgie,
élégance retenue, oiseaux à la Janequin ou parodie
de pucelle effarouchée, ce qui frappe à chaque fois,
c’est l’exceptionnelle maturité du Poème
Harmonique : raffinement des jeux de dynamiques et de timbres
(écoutez ce cornet dans l’air d’Hassler), sens du
tactus juste (la Pavane !), splendide diction qui magnifie la
mélodie, et, aux côtés d’un trio masculin
superlatif, une Claire Lefillâtre souveraine, onctueuse et
d’une précision diabolique. Et cette signature sonore
fusionnelle entre elle et les entrelacs timbriques que tisse Vincent
Dumestre, union qui en rappelle un autre, somptueuse, celle de Savall
et Figueiras. Indispensable.
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