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VSPRS
Musique composée par Fabrizio Cassol

 inspirée par le « Vespro della Beata Vergine » de Monteverdi

Avec :
Aka Moon (Fabrizio Cassol, Michel Hatzigeorgiou, Stéphane Galland) ; Oltremontano (Win Becu, Fiona Russel, Jamie Savan, Joost Swinkels, Caroline Van Dyck, Adam Woolf), Tchai Limberger & Vilmos Csikos, Cristina Zacalloni, Claron McFadden, Maribeth Diggle.

Enregistré en mai 2006 au studio de la VRT à Bruxelles
Notice de présentation en français et anglais

CD Cypres CYP0602 - 2006 – 70’49


La messe est dite !


Il n’y a pas de raison ! Si le cross-over fonctionne dans un sens, Anne-Sofie Von Otter chantant Abba, Renée Fleming du Brad Mehldau et Cathy Berberian des airs des Beatles pour ne citer que des exemples récents, les jazzmen ou groupes contemporains peuvent bien aller chercher dans des pièces classiques leur inspiration. Les exemples ne sont, là non plus pas rares, Gainsbourg ayant « collaboré » avec Brahms et Chopin, Sting avec Prokofiev ou Morane avec Bach… Le cross-over permet aussi de mélanger les musiques du monde, façon « Ocora Radio France », comme le disque consacré à « Mozart d’Egyptien » chez Virgin Classics l’a montré. Sans doute certains y voient-ils un moyen de lutter contre le clash des civilisations !

Ce mystérieux « VSPRS », au titre expurgé de toute voyelle et publié en octobre par la jeune maison d’édition Cypres, s’insère dans cette lignée, avec une personnalité très forte, si l’on peut dire pour un disque.

Ces 71 minutes sont la trace sonore d’un spectacle créé par le chorégraphe et metteur en scène gantois Alain Platel qui connaît une impressionnante carrière en Europe. Créé en Belgique, il a déjà été présenté à Paris au Théâtre de la Ville en février dernier, a tourné un peu partout en Europe (Italie, Allemagne, Irlande, Pays Bas, Espagne) avant un passage au Festival d’Avignon. Sa carrière française se poursuit (Lille début décembre, puis Brest, Amiens, Toulouse, Le Havre et)… avant le Japon, la Corée, le Canada et New York !

Pour qui n’a pas vu le spectacle, ce qui est mon cas, la pochette et le livret du CD, fort réussis, permettent d’imaginer un univers résolument contemporain, mêlant dans une dominante de blanc (le fond de la scène est constituée d’une avalanche de vêtements) les danseurs et les musiciens, entre lesquels on imagine sans difficulté une certaine harmonie.

Les musiciens, justement, sont eux aussi très cross-over ! Fabrizio Cassol, musicien multicarte (il est diplômé du conservatoire royal de Liège, en saxo… et en musique de chambre et participe au département de musique contemporaine) a composé avec trois ensembles : les baroqueux d’Oltremontano, les gypsies Tcha Limberger et Vilmos Csikos et ses musiciens à lui d’Aka Moon, qu’il qualifie de « tout terrain ».

Le résultat est surprenant, séduisant parfois, agaçant souvent. Les morceaux sont assez différents les uns des autres, créant certes le contraste mais aussi parfois le rejet. Les véritables numéros de jazz très réussis (« Sonata », au violon ; « Pulchra es » au saxo) alternent avec des parties que l’IRCAM ne renierait pas et qui sont tout près des limites de ce que je peux écouter… Les références à Monteverdi sont astucieuses, d’abord par les titres des morceaux et leurs paroles, mais aussi par le rythme et le caractère des pièces ainsi apparentées. Soyons clair : il me paraît impossible de reconnaître, à l’aveugle, les liens entre les numéros du CD de Cassol et ceux de Monteverdi, mais une écoute en parallèle n’est pas inintéressante. Les influences tziganes, et, plus souvent encore, orientales, sont beaucoup plus évidentes, par exemple dans le « Ave maris stella » ou dans le « Audi caelum ». Les musiciens sont bons, notamment les cuivres d’Oltremontano et parfois, la mayonnaise prend, comme dans le « Laetatus sum » ou l’ensemble des musiciens se trouve entraîné dans un rythme entêtant.

A côté des instrumentistes, les interventions des trois chanteuses (et qui ne sont qu’en alternance dans le spectacle si l’on comprend bien ce qu’en dit Fabrizio Cassol dans la notice) sont moins convaincantes, en particulier pour Mademoiselle Christina Zavalloni dont la voix m’est apparue difficilement supportable et ce, dès la première plage du CD… ce qui jette un froid. Maribeth Diggle rattrape le coup dans le « Ave Maris Stella ».

Au total, pour ceux qui ont vu ou qui verront le spectacle et qui l’auront aimé – et ils seront manifestement nombreux -, « VSPRS » sera un « aide mémoire » précieux.

 
 
                                Jean-Philippe THIELLAY

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