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Franz Schubert (1797-1828)

WINTERREISE

Cycle de Lieder sur des poèmes de Wilhelm Müller

Hans Jörg Mammel (ténor)
Arthur Schoonderwoerd (pianoforte de Johann Fritz)

1 CD Alpha – 3760014191015




Un hiver interminable


Originalité de ce disque, l’accompagnement, joué sur un pianoforte de Johann Fritz bientôt bicentaire, mais très bien conservé. La sonorité boisée et indéniablement « vieille » (au bon sens du terme) de l’instrument renforce de façon admirable les accents médiévaux qui parsèment le cycle tout en restant pour le ténor un support fiable. On regrettera tout juste que par endroit Arthur Schoonderwoerd se laisse aller à certaines brusqueries, mais au moins le pianiste souhaite-t-il visiblement habiter ce Voyage d’hiver, ce qui ne semble pas être le cas de son chanteur.

Hans Jörg Mammel a une belle voix, ainsi qu’un bon sens qui lui interdit de sur-interpréter le Lied et de faire un sort à chaque mot des poèmes de Müller. Mais à force d’éviter d’en faire trop, le ténor parvient surtout à ne pas en faire du tout ! Gute Nacht, transformé en rengaine un peu ennuyeuse, donne le ton immédiatement. Une expression monochrome, uniformément plaintive et geignarde, qui ne me semble pas être celle requise pour les malheurs du jeune corniste, une espèce de grisaille continuelle, cela durera tout le cycle. Le pas traînant, la tête baissée et les mains derrière le dos, Mammel traverse son Winterreise, revient sur ses pas, s’arrête, hésite, reprend le chemin, s’égare encore et encore, ne nous parle à aucun moment de désespoir, de folie, d’ironie, ou de résignation, et conclura sur un Leiermann soporifique comme ce n’est pas permis (alors même que l’accompagnement est plus inspiré que jamais).

L’honnêteté me fait tout de même reconnaître que dans les Lieder moins « lents », lorsque la phrase s’accélère et que le pas s’allonge, les choses s’améliorent, l’inexistence des mots faisant place à une sorte d’urgence bienvenue (il est vrai que le chanteur n’y affronte plus les longues phrases et les silences où il lui est si difficile de raconter quelque chose). A cet égard, une Krähe, assez hallucinée, un tendre Frühlingstraum, ou encore un Mut insouciant sont d’agréables minutes, mais le Winterreise dure une heure !


   Clément TAILLIA

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