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Un jour, une création : 23 novembre 1921, Kamila Kabanova ?

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23 novembre 2021
Un jour, une création : 23 novembre 1921, Kamila Kabanova ?

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C’est à Brno, en mars 1919, que Leoš Janáček voit pour la première fois l’un des grands chefs-d’œuvre du théâtre russe du siècle précédent, L’Orage, d’Alexander Ostrovski, dans sa traduction tchèque toute neuve. 15 ans après sa Jenůfa et alors qu’il vient juste de composer les excentriques Voyages de M. Brouček, le compositeur est conquis par le sujet âpre et violent de ce drame familial implacable. Il en acquiert les droits aussitôt et se met au travail pour l’adapter pour l’opéra. Comme à son habitude et comme il est convaincu qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, il écrit seul, comme pour son premier, Sarka – encore inédit à l’époque – et comme pour Jenůfa. Il se met ensuite à la partition, qu’il termine au printemps 1921 et à laquelle il donne le nom de Katia Kabanova.

Janáček refonde largement la pièce originale, supprime des personnages et resserre beaucoup l’intrigue, pour mieux en restituer l’âpreté. Des 5 actes initiaux, il en fait trois. Dans ce huis-clos étouffant, Katia est une jeune femme frustrée et malheureuse dans son mariage avec Tikhon, un homme falot et malhabile en tout. La mère de ce dernier, la veuve Marfa Igniatevna dite Kabanikha, propriétaire terrienne, écrase le couple de son autorité et de son mépris pour Katia, qui confine à la haine. Grâce à Varvara, fille adoptive des Kabanov qui veut l’aider, Katia revoit Boris, une force de la nature, qui appartient à une famille de commerçants, les Dikoï, dont il est le neveu détesté. 

Boris aime Katia et Katia est attirée par cette sorte de contraire de son mari. Elle a peur d’elle-même car elle sait qu’elle ne saura pas résister à la tentation. Alors elle supplie Tikhon de ne pas partir en voyage d‘affaires, de ne pas la laisser seule. Son mari ne comprend rien à ses jérémiades et s’en va, non sans déclarer devant tous qu’il lui demande de rester fidèle et de se soumettre à l’autorité de l’horrible Kabanikha, qui n’a certes pas besoin qu’on l’y autorise et qui la tance d’entrée.

Varvara, l’entremetteuse, propose un rendez-vous secret avec Boris, après avoir volé la clé d’une porte dérobée à Kabanikha. Katia hésite, puis accepte, tandis que Varvara a aussi donné rendez-vous à son propre amant Koudriach, au même endroit. Katia arrive, agitée, mais, comme prévu, ne résiste pas à son attirance pour Boris à qui on comprend qu’elle va se donner.

Un peu plus tard, Tikhon est revenu de son voyage et alors qu’on se promène en groupe le long de la Volga, un orage s’annonce. Varvara dit son inquiétude à Koudriach : Katia est de plus en plus instable, comme torturée par le remord. De fait, Katia survient et, devant Kabanikha et Tikhon, s’accuse d’adultère avec Boris. Elle s’enfuit alors que l’orage se déchaine. Ses amis la cherchent. Varvara et Koudriach décident qu’ils partiront ensemble pour Moscou et Boris retrouve Katia. Mais lui-même doit partir pour la Sibérie, sur l’ordre de son oncle, furieux du discrédit que son comportement a jeté sur sa famille. Désespérée, Katia se précipite dans la Volga. C’est Dikoï  qui ramène le corps à Tikhon, qui, horrifié et dévasté, car il aimait sincèrement sa femme, accuse Kabanikha de l’avoir tuée. Avec toute la morgue qu’elle peut montrer, la vieille femme se contente de remercier l’assistance de la peine qu’elle s’est donnée pour rechercher Katia.

Derrière la figure tourmentée de Katia, c’est pourtant une autre femme qu’il faut chercher, bien réelle celle-ci et à laquelle Janáček pense nuit et jour, Kamila Stösslová. Il l’a rencontrée en 1917 et, bien que marié – tout comme elle – parfaitement indifférent aux 40 ans qui les séparent, tombe amoureux comme un adolescent. Kamila devient une obsession, bien qu’elle se montre très ambivalente à son égard : elle ne l’aime pas, mais restera autant qu’elle le pourra auprès de lui, jusqu’à son lit de mort, en 1928. C’est la muse qui éclairera toute la dernière partie de la vie créatrice du compositeur. Il lui écrit tous les jours et la voit partout dans ses œuvres : elle est Katia, elle sera la petite renarde rusée et même Emilia Marty de  l’Affaire Makropoulos. La sensualité torturée de Katia n’est que le reflet des sentiments de Janaček pour sa muse.

Et quelle muse ! La partition de Janáček est un immense chef-d’œuvre, salué comme tel lors de la première, voici 100 ans, au théâtre de Brno. Acclamé, le compositeur est rappelé des dizaines de fois. Trop complexe, pourtant, pour nombre de maisons d’opéra, il lui faudra attendre de longues années avant de s’imposer. Il ne sera ainsi monté à Paris (Opéra-Comique) qu’en 1968. 

En voici un extrait du premier acte, lorsque Katia va confier à Varvara ses rêves et ce sentiment qui la taraude : elle en aime un autre… sur la musique aérienne de Janáček. C’est aussi une occasion de rendre hommage à celle qui fut l’une des plus grandes interprètes de Janáček, Elisabeth Söderström, ici aux côtés de la Varvara de Libuše Márová dans l’enregistrement de référence de l’opéra, dirigé par Charles Mackerras à la tête des Wiener Philharmoniker pour Decca au milieu des années 1970.

 

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