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Un jour, une création : 13 mai 1890, une œuvre « indigne du noble nom qu’elle porte » ?

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10 mai 2020
Un jour, une création : 13 mai 1890, une œuvre « indigne du noble nom qu’elle porte » ?

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Se mesurer à Dante, au poète, comme le fit Liszt, ou à ses personnages comme le firent tant d’autres durant le XIXe siècle, n’est pas pour Benjamin Godard un pari très original. Il faut croire que les grands noms de la littérature italienne l’inspirent, lui qui avait déjà remporté le prix de la ville de Paris avec un opéra sur Le Tasse 12 ans avant de créer cet ambitieux Dante

C’est donc au monument lui-même que s’intéressent Godard et son librettiste Edouard Blau, déjà auteur des livrets du Cid de Massenet et du Roi d’Ys de Lalo. 

Les deux premiers des 4 actes se déroulent évidemment à Florence, en pleine guerre des Guelfes et des Gibelins. Le Collège du peuple veut élire le déjà très renommé Dante nouveau Prieur de la ville pour tenter d’apaiser les conflits. L’intéressé veut décliner, mais la femme qu’il aime secrètement, sa muse, qui va épouser son ami Simeone Bardi, Beatrice, le pousse à accepter. Elle aussi éprise du poète, elle croyait qu’elle ne le reverrait pas et ne cache pas son trouble lorsqu’il paraît devant le peuple. Jalousie garantie de Bardi, d’autant que la confidente de Beatrice, Gemma, vient dire à Bardi qu’il lui faut renoncer à celle-ci, ce qu’il refuse, dévoré par la jalousie. Noir sentiment que partage Gemma, elle-même amoureuse de Dante. Mais Beatrice les a entendus et décide de s’éloigner de Dante pour le protéger. Mais celui-ci vient la retrouver et lui redit tout son amour. Elle cède mais Bardi met fin à ces tendres retrouvailles : Charles de Valois, nouveau vicaire pontifical envoyé par Boniface VIII, vient d’entrer dans la ville et de provoquer un coup d’Etat qui va chasser les Guelfes blancs et les Gibelins. À la grande satisfaction de son rival, Dante est condamné à l’exil et Bardi entend expédier Beatrice dans un couvent.

Dans sa retraite sur le Monte Posilippo près de Naples, Dante vient visiter le tombeau de Virgile et implorer qu’il lui rende l’inspiration pour écrire le poème idéal qui lui rendra Beatrice. Il s’endort et Virgile sort de son tombeau pour guider le poète aux Enfers, où il rencontre Francesca et Paolo, puis au Paradis où il voit Beatrice entourée d’anges. Elle lui est promise s’il achève son poème.

Réveillé par les bergers, Dante décide de retrouver sa bien-aimée coûte que coûte. Bardi survient, plein de remords et pour obtenir son pardon, il veut justement guider Dante au couvent napolitain où la jeune femme est cloîtrée. Mais il est trop tard. À peine retrouve-t-elle Dante, accompagné de Bardi mais aussi de Gemma – tous réconciliés – elle meurt. Désespéré, Dante est réconforté par Gemma et réalise que c’est pour le souvenir de Beatrice qu’il doit finir son œuvre : « Dieu l’a faite mortelle, moi je veux l’immortaliser ».

La création de l’opéra au théâtre du Châtelet par la troupe de l’Opéra-Comique, est un succès public sans lendemain pour Godard que la critique ne ménage pas. Dédiée à Ambroise Thomas, la partition paraît aux observateurs par trop « démodée », ce qu’il faut traduire par « non wagnérienne ». C’est Camille Bellaigue qui portera le coup de grâce dans l’incontournable Revue des deux mondes : Dante est une œuvre « inutile et imprudente (…) faite à la hâte et à la légère ; indigne d’abord et surtout du redoutable nom qu’elle porte ». Elle avait donc le double tort d’être à la fois trop et pas assez (en particulier pas assez « dantesque », ce que l’impressionnante scène avec Virgile vient largement démentir). 

Godard écrira encore deux opéras tout aussi oubliés que ce pourtant fort intéressant Dante. Trop tard pour Godard, qui, terrassé par la tuberculose, mourra prématurément 5 ans après sa création. Mais pas trop tard pour réhabiliter la partition : outre sa magnifique résurrection grâce à l’indispensable fondation Palazzetto Bru Zane, Dante figure en bonne place dans l’excellent et récent disque récital de Benjamin Bernheim, avec un grand air hélas trop court du 1er acte de l’opéra : « Tout est fini pour moi ». Mais non !

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