Depuis plus d’un siècle, la question de l’ordre des actes dans Les Contes d’Hoffmann divise musiciens, metteurs en scène et musicologues. L’ouvrage, laissé inachevé à la mort du compositeur, a connu d’innombrables remaniements qui brouillent sa logique dramaturgique.
Pierre Dumoussaud, qui dirige l’ultime chef d’œuvre d’Offenbach dans une mise en scène de Lotte De Beer à l’Opéra Comique du 25 septembre au 5 octobre, apporte sa réponse.
Dans l’acte V, Hoffmann cite ses trois amours – Olympia, Antonia et Giulietta – dans un ordre précis, qui semble figer la progression du récit (bien qu’au premier acte, le poète les évoque autrement : « artiste, jeune fille, et courtisane », ce qui suggérerait Antonia avant Olympia). À cela s’ajoute une vérité psychologique : n’est-ce pas d’abord le jeune homme naïf qui s’éprend d’Olympia, avant l’amant passionné prêt à enlever Antonia, puis l’homme désabusé qui se laisse séduire par Giulietta ?
La confusion vient sans doute des versions postérieures, qui ont replacé l’acte d’Antonia en dernier pour donner un final plus spectaculaire. Mais l’acte vénitien, avec son atmosphère désenchantée, porte en lui la véritable conclusion dramatique des Contes d’Hoffmann. Aujourd’hui encore, aucune version ne s’impose définitivement, et chaque production choisit son chemin. Ce flou contribue peut-être, paradoxalement, au mystère et à la modernité de l’opéra d’Offenbach.