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Christiane Eda-Pierre, une vie d'excellence

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Livre
23 février 2020
Un parcours d’exception

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Préface de Jean-Claude Beaujour

Ouvrage disponible auprès de l’auteure

88, Rue Victor Sévère

97200 Fort de France

2019, 130 pages

Christiane Eda-Pierre est sans nul doute l’une des cantatrices françaises les plus marquantes du XXe siècle. C’est de l’histoire de sa vie et de sa carrière peu communes que Catherine Marceline, avocate au Barreau de Fort de France, a décidé de nous entretenir dans son livre. Disons d’emblée que l’auteure rend le plus bel hommage qui puisse être à la grande artiste martiniquaise et nous apprend beaucoup sur elle.
Née à la Martinique le 24 mars 1932, la soprano est la fille de William Eda-Pierre, décédé très jeune, et d’Alice Nardal, l’une des sept sœurs Nardal, famille d’intellectuels de la bourgeoisie martiniquaise, et la nièce de Paulette Nardal, la première étudiante noire à la Sorbonne. Cette dernière présentera une thèse sur Harriet Beecher Stowe, antiesclavagiste nord-américaine, bien connue pour avoir écrit La Case de l’oncle Tom. Plus tard, elle sera la secrétaire parlementaire de deux députés et la première journaliste noire en France. Avec ses sœurs, Jeanne, Andrée et Alice, elle recevra dans leur maison de Clamart l’élite de la diaspora noire, à commencer par Léopold Sédar Senghor, Pierre Aliker, compagnon de route d’Aimé Césaire, ainsi que ce dernier, et même la célèbre mezzo-soprano Marian Anderson. Un comité est aujourd’hui constitué pour faire entrer au Panthéon Paulette Nardal, pionnière du concept de la négritude avant Césaire et Sédar Senghor.
En septembre 1950, Christiane Eda-Pierre quitte la Martinique pour Paris, où pendant deux ans, elle travaille à l’Ecole Normale de Musique. Elle se destinait à devenir pianiste, mais, suivant les cours de Charles Panzera, elle passera du piano au chant. En 1954, la jeune soprano intègre le Conservatoire de la Rue de Madrid, où elle travaille le chant avec le baryton Louis Noguera, et la diction avec la comédienne Gabrielle Fontan. Christiane Eda-Pierre remporte plusieurs récompenses : le prix Lucienne Bréval, le prix Ambroise Thomas, le prix Alice Ducasse. Puis elle sort du Conservatoire en 1957 avec le premier prix de chant, le premier prix d’opéra et le premier prix d’opéra comique.
Quand elle commence sa carrière, Christiane Eda-Pierre est la seule cantatrice noire de France. Avant elle , il y avait eu Germaine Lubin, qui niera ses origines paternelles antillaises pour s’inventer des ascendances kabyles d’un père prétendument diplomate. Christiane Eda-Pierre débute, en 1958, dans Les Pêcheurs de perles à l’Opéra de Nice. La même année, on la voit dans Rigoletto à Mulhouse où elle reçoit un excellent accueil de la part de la presse. Elle retourne un an plus tard dans la ville alsacienne pour incarner Lakmé, l.’un de ses rôles les plus significatifs. En 1959, elle débute au Festival d’Aix-en-Provence, dans le rôle de Papagena de La Flûte Enchantée, début d’une longue collaboration avec Gabriel Dussurget, puis en 1960, elle apparait Salle Favart.
La carrière de l’artiste se poursuit aux quatre coins du monde. En mars 1974, elle prend part à une production marseillaise des Puritains, qu’elle avait déjà chanté à Wexford en 1973. Dans la cité phocéenne, elle interprète l’ouvrage bellinien aux cotés d’Alfredo Kraus, Robert Massard et Pierre Thau. Ce spectacle historique sera considéré comme une production de référence pendant un demi-siècle. En 1980, elle chante Rigoletto devant 300 000 personnes à Central Park. Son duc de Mantoue est Luciano Pavarotti ; puis elle reprend l’ouvrage au Met. En 1986, Christiane Eda-Pierre se retire de la scène mais continue à donner des récitals jusqu’en 1995.
Professionaliste à l’extrême, elle se fait suivre aussi bien par un oto-rhino-laryngologiste que par un kinésithérapeute pour se préparer à la scène. Pour mieux comprendre l’intrigue de Lucia di Lammermoor, elle dévore le roman de Walter Scott, tout comme elle lira lesContes fantastiques d’Hoffmann, avant d’incarner les quatre rôles féminins du chef-d’œuvre d’Offenbach. En cela, elle diffère de Maria Callas qui estimait inutile de lire le moindre ouvrage avant une prise de rôle ; chacun sait que Callas n’était pas une intellectuelle mais une instinctive. Avant d’incarner Violetta Valéry, elle rend visite à la comédienne Edwige Feuillère, dont elle dira avoir beaucoup appris.
Catherine Marceline n’hésite pas à raconter que la célèbre soprano martiniquaise eut maille à partir avec un célèbre ténor italien très corpulent qui ne voulait pas partager la vedette et qui fit pression sur ses épaules pour l’empêcher de se lever. De même , elle est maltraitée par un soprano colorature dont elle est la doublure, qui la jalouse et qui va jusqu’à dire « Si Eda-Pierre est sur le même plateau que moi, je ne chante pas », ce qu’elle fit malheureusement. Un jour, alors que les deux collègues s’affrontent dans l’entrée de l’Opéra-Comique, arrive Françoise Garner qui s’adresse ainsi au soprano indélicat : « Moi, je ne suis pas la douce Christiane Eda-Pierre. Si vous continuez, je vous fous deux balles, vous comprenez ». Bien plus tard, lors d’un jury, Christiane Eda-Pierre retrouva sa collègue mal elevée, qui s’excusa (enfin !) ; en grande dame qu’elle est, elle lui pardonna.
Malgré ces soucis, le talent de Christiane Eda-Pierre est reconnu et récompensé. Frederic Mitterrand, alors Ministre de la Culture , lui remet les insignes de Grand officier de l’Ordre National du Mérite. Elle est également Officier de la Légion d’Honneur et Commandeur des Arts et Lettres .
L’auteure évoque également le rôle qu’a joué dans la vie de la soprano le célèbre maître d’armes Pierre Lacaze, rencontré en 1955 et qui sera son mari jusqu’à son décès en 2006 ; il est aussi fait mention de leur fils Dominique et de Didier, fils de Pierre Lacaze.
Catherine Marceline indique avec précision le répertoire de Christiane Eda-Pierre, les villes où elle s’est produite, ses principaux partenaires, ses enregistrements. Elle qui n’est pas musicienne de formation, a écrit un magnifique ouvrage au style alerte et plaisant, avec la rigueur de la juriste et la précision de l’historienne. Le résultat de ses deux années de travail est une belle réussite. Plongez vous dans ce livre qui comble une lacune de l’édition, et vous entrerez dans un joli conte de fées !

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