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Edito
2 avril 2009

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Il eût été bien étonnant que l’éditorial de ce mois-ci ne parlât pas de la saison concoctée par Nicolas Joel et révélée lors d’une conférence de presse fleuve voici quelques jours. Mais que dire ? Les commentateurs se sont hasardés à tirer bien des leçons d’une saison comportant des reprises notables et des nouveautés intéressantes, faisant la part belle à certains chanteurs, en oubliant d’autres, et semblant vouloir rompre avec la manière provocatrice qu’avait Gérard Mortier de mener sa politique artistique et de l’imposer au public.

Soit. Pour ma part, incapable de savoir ce que nous réservent Mireille ou La Ville Morte tant que je ne les aurai pas vus de mes propres yeux, je me garderai bien de tout verdict. On nous promet de l’émerveillement. Va pour l’émerveillement. Et si on n’est pas émerveillé, on sera peut-être simplement content.

Non, la seule chose que m’inspire ce programme, c’est qu’enfin je pourrai emmener mon petit cousin ou ma grand tante à l’opéra sans risquer de devoir, à l’entracte, les ramener chez eux pour leur éviter le spectacle de fornication dans des hangars désaffectés ou de défécation dans des arrière-salles de Kommandantur. C’est déjà ça. N’est-il pas regrettable, au fond, que le vulgum pecus réduise le travail de Mortier aux quelques banalités qui précèdent. Soit, Va pour les banalités.

Mon seul véritable regret dans cette saison, c’est que c’est une saison d’opéra. Une de plus. Et que l’Opéra de Paris, sous Joel comme sous Mortier, et comme sous tous les autres, consent une fois de plus à prolonger la vie artificielle de ce genre mort qu’est l’opéra. Mortier avait fait un peu trop dans la germanitude. Joel fera plus dans la francitude. Mais tous les deux font dans l’opérattitude. A quand un directeur qui prendra les rênes de la maison en s’écriant : allons, abattons les cloisons, que s’écroulent les murs de ce genre vieux de deux ou trois siècles ? Que sur la scène de l’Opéra apparaissent des œuvres qui ne furent pas pensées pour elle, ni de près ni de loin ! Faisons de l’Opéra de Paris le lieu improbable de ce à quoi l’opéra comme genre prit sa source avant de s’enferrer dans le genre bourgeois : la tragédie grecque, la messe, la célébration du couronnement, la bacchanale – en somme, tout ce que les rituels humains purent offrir pour unir les hommes autour de symboles et de puissances !

Pourquoi enfin ne pas donner Les Perses d’Eschyle en grec, avec force tambourins ? Pourquoi ne pas donner sur la scène de Bastille une vraie Messe du Couronnement, avec fastes et trompettes ? Un mystère du Moyen Âge où tous serions conviés à nous flageller ? Pourquoi ne pas rappeler à l’Opéra qu’il n’est qu’un succédané lointain et affadi du temple, de l’amphithéâtre antique, de la cathédrale, du parvis, de l’antre préhistorique où lumières et figures dansaient sur la paroi au son de grognements inspirés ?

Que sonnent les musiques sacrificielles des anciens Germains ! Que s’entende de nouveau la voix des chamanes dans des danses délirantes ! Que des femmes nues couvertes de poussière reprennent en chœur les plus beaux airs de Monteverdi ! Donnez-nous une Saint Matthieu qui nous fasse craindre Dieu et récitez pendant trente heures d’affilée le Mahabarata avec interludes instrumentaux ! Dans mon petit cabinet d’auditeur solipsiste, j’entends encore dans l’opéra vibrer la tripe et le trip : las, lorsque je me rends dans l’enceinte de l’institution, ça sent la valda et la naphtaline.

Allons ! C’est une bien jolie saison que nous a préparée Monsieur Joel, ça va être bien, si si, je vous jure… zzzz….n’oubliez pas de me réveiller quand ce sera fini….zzzzzzzzzzzz……

Sylvain Fort

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