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Cinq questions à Michael Spyres

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Interview
12 septembre 2025
Michael Spyres chante le rôle-titre des Contes d’Hoffmann à l’Opéra Comique du 25 septembre au 5 octobre.

Infos sur l’œuvre

Détails

Nous avons rencontré Michael Spyres lors de son passage à Ravello, où il défendait son album Contraténor avec Francesco Corti à la tête d’Il Pomo d’Oro.

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La semaine passée vous chantiez à Bayreuth Siegmund (Die Walküre) et Walther (Meistersinger), ce soir c’est le baroque napolitain à Ravello et dès le 25 septembre vous serez Hoffmann, dans le chef-d’œuvre d’Offenbach, à l’Opéra-Comique. Dans vos récent CDs vous explorez les régions les plus hautes de votre tessiture (Contra-tenor), comme les plus graves (Barytenor). Vous démontrez brillamment que vous pouvez tout chanter, mais est-ce que vous voulez tout chanter ?

Oui, absolument ! En comparaison avec des chanteurs du XIXe siècle, jusque vers 1860, j’ai le sentiment qu’ils pouvaient tout chanter. Et depuis cette période, je dirais que les plus polyvalents sont Gedda ou Domingo, et j’ai fait des choses plus folles que l’un et l’autre. C’est le côté un peu dingue de mon caractère, j’aime et je crois que c’est important de chanter un peu de tout. Parce que si vous chantez uniquement un seul type de répertoire, votre voix devient statique et vous n’avez qu’une seule manière de chanter. Vous avez une base technique mais si vous chantez seulement le belcanto, vous n’utiliserez pas votre voix « complète » tout le temps. C’est utiliser sa voix comme un instrument. Mais avec Wagner vous mettez en œuvre tout votre corps et votre voix, comme un instrument. Et si vous faites cela trop souvent, cela peut raccourcir votre carrière. Donc je crois qu’il y a beaucoup d’avantages à parcourir tout le répertoire. J’ai débuté avec des comédies musicales, de la folk music, beaucoup de théâtre. Avec mon frère et ma sœur on a fait beaucoup de musicals. Ma mère et mon père ont écrit des comédies musicales que nous avons jouées en famille.

Mais ce qui prend des années, c’est l’étude des styles. Il existe une expression anglaise qui dit : « A jack of all trades and a master of none » [un touche-à-tout et un maître de rien], c’est un peu moi.

Parlez-nous de votre collaboration avec Il Pomo d’Oro

J’ai d’abord entendu parlé d’Il Pomo d’Oro il y a environ 20 ans je pense. J’ai été impressionné par leurs enregistrements et j’ai adoré ce qu’il faisait. Et puis grâce à Joyce DiDonato, une amie avec qui nous avons partagé des productions sur Berlioz, et j’ai remarqué les grands projets qu’elle a réalisé avec Il Pomo d’Oro. Nous en avons parlé et j’ai rencontré le responsable de l’ensemble, Giulio d’Alessio. Nous avons évoqué des possibilités de collaboration et ce sont eux qui ont dit qu’ils adoreraient travailler avec moi. Nous avons réalisé ensemble mon premier album avec eux, Contra-ténor, et depuis lors nous avons enregistré quatre différents albums au cours des cinq dernières années. J’adore travailler avec eux parce qu’ils sont flexibles et ne sont pas limités au baroque. Nous pouvons même explorer un répertoire plus romantique, ou des Arie Antiche, et de la musique du temps de Monteverdi. J’aime vraiment leur flexibilité, ne pas être limité dans une période de 60 ans dans le baroque. Ils aiment explorer d’autres périodes, juste comme moi.

En tant qu’interprète, je n’aime pas l’idée que le soliste ou le chef est le dieu. Nous faisons tous partie de la sainte Trinité : l’interprète, le public et celui qui dirige. Comme soliste, vous devez savoir quand être la marionnette et quand être le marionnettiste. Vous devez toujours pouvoir réagir à ce qu’ils font. Et si vous remarquez qu’ils vont trop vite, oh, ils vont devoir me suivre, c’est toujours une question de donner et de recevoir. Pour moi, c’est cela la musique : elle est écrite pour qu’on reste ensemble, mais une fois qu’on la maîtrise, on peut jouer avec et introduire des nuances ; et c’est qui se passe quand on est sur scène, car on tourne avec ce projet depuis plusieurs années. On peut vraiment s’amuser maintenant.
Notre prochain projet tourne autour des demi-dieux. J’ai toujours été fasciné de voir comment l’opéra est parti de sujets qui traitent des dieux, puis des demi-dieux, avant d’évoluer vers l’incarnation des dieux en rois et reines, comme Mozart l’a fait en son temps. Et tout cela conduit au vérisme, de l’opéra dans la vraie vie. C’est vraiment intéressant de se pencher sur ces demi-dieux, car c’est ce que nous sommes. Beaucoup de gens croient en Dieu, mais nous sommes coincés entre l’humanité et le domaine des dieux. Nous avons tendance à nous comporter comme des dieux dans notre relation aux autres.

A partir du 25 septembre, vous chanterez à l’Opéra-Comique l’un de vos rôles favoris Hoffmann. 

C’est un tel honneur pour moi de pouvoir le chanter à l’Opéra-Comique, où il a été créé. C’est une version très différente que nous faisons, et c’est une des choses que j’aime à propos d’Hoffmann : il n’y a pas de version définitive. C’est une version, avec laquelle je ne suis pas très familier. J’ai déjà chanté trois versions différentes. La première que j’ai chantée était en allemand, que j’ai jouée en Autriche voilà 25 ans. Je me souviens encore du texte en allemand. [Il chante]
« Es war einmal am Hof von Eisenack, am Hof von Eisenack,
Ein missgestalteter Zwerg, der hieß Kleinzack! ».
Je préfère en français, mais ça marche en allemand ! Et cela montre la flexibilité de Hoffmann et c’est ce qui est incroyable avec Offenbach. Il était tellement malin – comme Rossini – pour savoir comment produire de l’art de grande qualité en tenant compte du public, qui réagit à ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. Ce qui entretient la flamme de l’opéra, c’est cette interaction entre les artistes et le public et les critiques, pas uniquement les interprètes. Nous les artistes sommes les véhicules : et parfois certains solistes oublient que ce n’est pas eux qui l’ont écrit, que ce ne sont pas eux les personnes les plus importantes au monde. C’est vous qui présentez, c’est vous le passeur au travers duquel l’art vit. Comme on dit, il est facile de penser qu’on est la vague, alors que vous n’êtes que celui qui surfe sur la vague.
El il faut penser au public. Ceux qui oublient cela et font de l’art pour l’art, pour moi c’est une tragédie, c’est un problème d’égo.

Pour revenir à la version qui sera donnée, une reprise de celle créée en janvier dernier à l’Opéra du Rhin, en coproduction avec le Volksoper de Vienne, ils ont fait quelques coupures et aménagements. Et il y a beaucoup plus de dialogues parlés, ce qui est un défi pour moi. Je parle le français plutôt bien, pour un étranger, mais interpréter les dialogues convenablement dans un théâtre, c’est tellement excitant parce que c’est à l’Opéra-Comique, le public français le plus exigeant. Je suis très excité, mais aussi nerveux, comme toujours.

Vous vous sentez particulièrement bien en Italie, pays de l’opéra. Quelle est votre histoire avec la péninsule ?

Je suis venu en Europe pour auditionner partout. J’avais 19 ans et le premier pays où je suis venu, c’était l’Italie. Et je suis tombé amoureux de ce pays, le premier que je voyais en dehors des États-Unis. Je l’ai parcouru de haut en bas. Mes débuts dans une grande maison d’opéra, ce fut ici à Naples, au San Carlo, il y a vingt ans. J’apprenais encore ce qu’est l’opéra, et j’ai chanté Fidelio avec Toni Servilio comme metteur en scène. Il m’a appris  tellement de choses à propos du théâtre, du San Carlo et l’histoire de ce qui allait devenir ma vie, avec Rossini et l’école napolitaine. Vingt plus tard, j’ai un autre regard sur le monde en revenant en Italie et c’est formidable de venir présenter ici l’école la plus napolitaine des école de musique, avec des compositeurs oubliés par la plupart des Italiens, tels que Galuppi, Latilla, Porpora. Ce sont des personnalités incroyables qui ont conduit l’opéra vers Mozart, Rossini, Wagner, et il faut se souvenir de ces compositeurs.

Et puis, l’Italie, c’est aussi la langue, la nourriture et le vin !

Pasta o pizza ?

Pasta ! Mais avec l’âge je dois faire attention à ma consommation de carbohydrates ! Donc c’est plutôt « pesce o carne » !

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