C O N C E R T S
 
...
[ Sommaire de la rubrique ] [ Index par genre ]
 
......
NEW YORK
13/03/2007
 
 Ramon Vargas & Ruth Ann Swenson © DR

Charles GOUNOD

FAUST

Production : Andrei Serban
Décors et costumes : Santo Loquasto
Lumières : Duale Schuler
Chorégraphie : Nikolaus Wolcz

Faust : Ramon Vargas
Méphistophélès : Ildar Abradzakov
Marguerite : Ruthn Ann Swenson
Valentin : Hung Yun
Siébel : Karine Deshayes
Marthe : Jane Bunnell
Wagner : Keith Miller

Orchestre et Choeurs du Metropolitan Opera de New-York
Direction : Maurizio Benini

New-York, Metropolitan Opera
13 Mars 2007 (matinée)

UN FAUST COSMOPOLITE


Crée en 2005, la production d’Andrei Serban est reprise pour la première fois avec une distribution entièrement renouvelée. L’ouvrage reste toujours extrêmement populaire de ce côté de l’Atlantique et la salle est une fois de plus bien remplie malgré une distribution relativement moins prestigieuse qu’à la création. On retrouvera ici un ténor mexicain, une basse russe, un soprano américain, un baryton coréen et un mezzo français ; le tout sous une baguette italienne dans une production d’un metteur en scène d’origine roumaine. Et ça marche : c’est la magie de l’Opéra !

Succédant à Roberto Alagna, Ramon Vargas ne réédite pas tout à fait ses performances récentes sur cette même scène dans la défense du répertoire romantique français. Excellent en Roméo ou en Hoffmann, son Faust déçoit un peu : diction un rien négligé, ligne vocale « générique », sans ces raffinements dans la coloration auquel le chanteur nous avait habitué. L’incarnation dramatique est également peu intéressante, mais il faut reconnaître que le rôle ne prête guère aux performances théâtrales. Déception à relativiser néanmoins : Vargas est surtout inférieur à lui-même mais reste néanmoins un très bon Faust.

Récemment opérée pour un cancer du sein, Ruth Ann Swenson ne retrouve pas les planches au sommet de sa forme. Compte tenu des circonstances, on passera sur quelques suraigus escamotés et, plus généralement, sur un aigu instable et timide. Sur le reste du registre, la voix est demeurée intacte, lumineuse, et le personnage est émouvant sans histrionisme. On regrettera néanmoins une prononciation souvent difficile à comprendre.


 Ilbar Abdrazakov & Ruth Ann Swenson © DR

Succédant à René Pape, mais aussi à James Morris ou Samuel Ramey pour ne citer que des interprètes récents sur la scène du Metropolitan, Ildar Abradzakov a beaucoup de mal à camper un Méphisto captivant. Certes, la voix est saine, bien conduite, sans ces excès de port de voix des basses slaves de la vieille école ; mais, au-delà de ces qualités techniques, on reste sur sa faim sur le plan artistique. D’autant que le chanteur se permet de simplifier la mise en scène et en fait beaucoup moins que son prédécesseur. Ce Méphisto n’est ni diabolique, ni inquiétant, ni drôle, simplement bien chantant : c’est un peu juste.

Hung Yun est un Valentin sonore et bien chantant, au timbre corsé mais qui devrait approfondir davantage son jeu : la malédiction de Valentin n’est pas (seulement) qu’un torrent de décibels…

Habituée de la scène parisienne, où elle campa le même rôle aux côtés de Rolando Villazon, Karine Deshayes est un excellent Siebel, très juvénile.


 Karine Deshayes © DR

Sur le podium, Maurizio Benini sait donner une homogénéité musicale à ce plateau hétéroclite ; on regrettera des tempi qui s’emballent parfois sans raison mais on appréciera une belle pâte orchestrale sans que le chant ne soit jamais noyé.

A la deuxième vision, la production d’Andrei Serban n’apparaît pas davantage convaincante, sans qu’il n’y ait de véritable scandale. Simplement les idées « modernes » (pour le Met) ne sont guère originales pour un spectateur européen moyen ; et surtout, l’ensemble manque d’une vision aboutie : la recherche d’effets ponctuels prime sur une approche cohérente de l’ouvrage dans son entièreté.

Je reitère également mes réserves devant une version particulièrement amputée de la partition originale : le Metropolitan nous avait habitué à plus de rigueur musicologique ces dernières années en rétablissant, au contraire, des coupures traditionnels dans un certain nombre d’ouvrages du répertoire.




Placido CARREROTTI
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]