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AIX EN PROVENCE

25/07/02

 
Eugène Onéguine

Opéra de Piotr Ilitch Tchaïkovski
 

Mahler Chamber Orchestra
Europa Chor Akademie
Direction : Daniel Harding

Mise en scène : Irina Brook
Décors et costumes : Noëlle Ginefri

Eugène Onéguine : Vladimir Moroz
Tatiana : Olga Guryakova
Lenski : Daniil Shtoda
Olga : Ekaterina Semenchuk
Filippievna : Menai Davies
Madame Larina : Jacqueline Van Quaille
Le prince Grémine : Martin Snell

Festival d'Aix en Provence
Archevêché, 25 juillet 2002

Lire aussi la critique de Pierre-Emmanuel Lephay,
représentation du 19 Juillet 2002



En composant Eugène Onéguine, Tchaïkovski avait souhaité octroyer les rôles à des chanteurs de l'âge de leur personnage. C'est presque le cas de la distribution réunie dans la cour de l'Archevêché, car s'il est impossible aux interprètes d'avoir réellement l'âge d'Eugène, Tatiana, Lenski ou Olga, ils sont néanmoins jeunes et ils ont le physique, la silhouette, la vivacité de ceux qu'ils incarnent. Aidés par une direction d'acteur d'une finesse et d'une justesse rares, ils ont les attitudes vraies, les gestes qui font croire à leurs personnages.

Irina Brook s'est totalement concentrée sur les caractères des protagonistes et sur leurs relations. Le décor dépouillé est constitué de panneaux blancs pour la première partie et rouge pour la seconde, quelques accessoires : un lit, une table de banquet, un lustre, permettant de situer les lieux. Les costumes, élégants et seyants, sont intemporels : c'est une histoire universelle qui nous est contée, avec talent.

Nous n'entendrons pas de grandes voix, de timbres impressionnants, de vedettes internationales, nous entendrons les voix de l'amour, de la souffrance, de la mort : les voix du coeur.

Vladimir Moroz n'incarne pas Eugène Onéguine, il l'est - totalement. Snobinard tête à claque plus vrai que nature, il irradie d'un charme intense et mystérieux. Son chant est sans faute, et il sera intéressant, et même excitant, de comparer cette prestation avec son prochain Onéguine l'hiver prochain au Châtelet.

Olga Guryakova chante Tatiana comme elle respire, on ne sent aucune tension, aucune difficulté dans le redoutable air de la lettre. Ekaterina Semenchuk est un mezzo bondissant à qui les aigus posent toutefois problème.

Au premier abord, le timbre de Daniil Shtoda surprend. Un peu acide, il semble grêle et fragile et on pense que l'interprète ne tiendra pas toute la représentation. Or, de façon tout à fait surprenante, la voix s'affermit au fur et à mesure de la soirée, et l'air de Lenski devient envoûtant.

Madame Larina et la vieille nourrice ont également l'âge et le physique de leur rôle, ce qui est bien, elles ont aussi la voix de leur âge, ce qui l'est moins. Interpréter des personnages d'âge mur ne nécessite pas forcément de faire appel à des chanteurs à bout de voix, ceux qui se souviennent de la formidable prestation d'une Irina Arkhipova au bord de la retraite à Paris il y a quelques années comprendront ces lignes.

La direction de Daniel Harding est au scalpel, et le Mahler Chamber Orchestra exalte toute la beauté de la partition.

Les ballets sont exécutés avec brio par les choristes, qui à force de travail ont atteint un niveau comparable à celui de danseurs professionnels. Les bruits de coulisse faisaient mention de kilos perdus pour beaucoup d'entre eux !
  


Catherine Scholler
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