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Antonio VIVALDI (1678-1741)

Musica sacra vol . 3

Mottetti

Longe mala, umbrae, terrores (RV 629)
O qui coeli terraeque serenitas (RV 631)
Vestro Principo divino (RV633)
Canto in prato, ride in monte (RV 623)
Invicti, bellate (RV 628)
Nulla in mundo pax sincera (RV 630) 

Anke Hermann, soprano
Laura Polverelli, mezzo-soprano

Academia Montis Regalis
Alessandro De Marchi, direction

Enregistrement réalisé en octobre 2001
Opus 111 30 340 (Naïve) 







Après la Verità in cimento, ressuscitée par le fougueux Jean-Chrisophe Spinosi, Opus 111/Naïve poursuit l'exploration des vingt-sept manuscrits d'Antonio Vivaldi conservés à la Bibliothèque Nationale Universitaire de Turin avec six motets, sur les douze qui ont survécu aux aléas de l'Histoire. Comme l'écrit dans la notice Angelo Chiarle, "les motets écrits pour voix soliste n'étaient pas autre chose que des morceaux de bravoure destinés aux chanteurs, pour lesquels ils étaient "taillés sur mesure" en fonction des qualités vocales de chacun". Vivaldi a conçu nombre des siens pour Anna Girò, élève, puis interprète de prédilection (créatrice, entre autres, du rôle-titre de Griselda) et assistante du compositeur qui a su tirer profit de l'ambitus et de la plasticité exceptionnels de sa voix. De fait, qu'elles fussent destinées à "L'Annina del Prete rosso", comme la brocardaient ceux qui voyaient en Girò (ou Giraud) la maîtresse de Vivaldi, à d'autres pensionnaires de l'Ospedale della Pietà ou aux castrats romains, ces pages sont prétexte à plus d'une démonstration de virtuosité, notamment les alleluia conclusifs, en particulier celui de Nulla in mundo pax sincera. De ce point de vue, ce nouvel enregistrement comble nos attentes. 

Idéale de légèreté et de souplesse, Anke Hermann aborde avec un aplomb réjouissant la riante et virevoltante aria sur laquelle s'ouvre le très bucolique "Canta in prato". Certes, sa vocina un peu pointue, parfois acidulée, manque de moelleux et montre aussi quelques tensions (O qui coeli terraeque serenitas), mais elle signe une lecture tout en finesse de la ravissante sicilienne de Nulla in mundo pax sincera. Toutefois, si l'écriture de ces pièces, religieuses mais non liturgiques, semble bien profane, ce n'est pas une raison pour se cantonner dans une approche décorative et neutre, a fortiori lorsque la musique exige davantage d'expressivité, voire de recueillement. La réserve vaut aussi, dans une moindre mesure, pour Laura Polverelli. Le métal est superbe, la projection arrogante, la vocalisation énergique et très sûre, bref, dans les passages extravertis et brillants, le mezzo rayonne et nous enchante. En revanche, dans le magnifique larghetto "Descende, o coeli ros" (Longe mala, umbrae, terrores), pris, il est vrai, dans un tempo un peu vif, elle demeure en retrait et déçoit. Là où David Daniels osait un lyrisme raffiné, on aimerait qu'elle s'attendrisse, se laisse aller. Est-ce une particularité du manuscrit de Turin ? Alors que David Daniels et Catherine Denley (Hypérion) adressent leur prière à la voix céleste ("o coeli vox"), Laura Polverelli implore la "rosée céleste" ("o coeli ros"), image peut-être plus poétique, mais aussi moins spirituelle. Avis aux amateurs d'énigmes philologiques... De même, alors que le grain opulent du mezzo, sa plénitude sur toute la tessiture nous régalent dans Vestro Principo divino, Gérard Lesne et Nathalie Stutzmann se montraient plus attentifs au texte et à ses nuances. C'est d'autant plus dommage qu'Alessandro de Marchi, lui, épouse l'humeur changeante de la musique, relance et innerve le discours et soigne la délicate transition entre aria et recitativo.
 
 
 

Bernard Schreuders


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notes : Encore rare, au disque, on retrouve Anke Hermannn dans Juditha Triumphans de Vivaldi et l'isola Disabitata de Haydn, tous deux sous la direction d'Alessandro de Marchi
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