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Questionnaire de Proust : Elodie Kimmel et Loïc Felix, à la scène comme à la ville

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Interview
26 octobre 2024
Soprano et ténor, Elodie Kimmel et Loïc Félix forment un couple idéal de jeunes premiers d’opéra sur les scènes lyriques comme dans la vie. Ils se sont prêtés au questionnaire de Proust en duo.

Infos sur l’œuvre

Détails

Après un joli succès à l’opéra de Rennes cet automne dans la Sérénade de Sophie Gail, la jeune femme – qui affectionne de sortir des sentiers battus – chante actuellement au Cadre Noir de Saumur avec l’Ensemble Amarillis qu’elle retrouvera notamment à la Folle journée de Nantes début 2025. Parallèlement à sa carrière lyrique, paraitra le 15 novembre prochain son album de chansons originales en trio avec Jean-Michel Charbonnel et Cédric Affre.

Son compagnon, pour sa part, incarnera le Remendado dans Carmen à l’opéra de Naples le mois prochain, puis le Père confesseur du couvent dans Dialogues des Carmélites au Théâtre des champs Elysées en décembre prochain. Lausanne et Munich seront ses prochaines destinations courant 2025.

Mon meilleur souvenir dans une salle d’opéra ? 
EK : Lorsque j’étais adolescente, Orphée aux Enfers par Laurent Pelly à l’Opéra de Lyon, avec Nathalie Dessay et Laurent Naouri. Cela a été un choc théâtral, dramaturgique et comique.
LF : Un récital de Jessye Norman à la salle Pleyel en 1993 ou 1994. Décoiffant !

Mon pire souvenir sur scène ? 
EK : Un récital en plein hiver dans une salle pas assez chauffée.
LF : Chanter masqué devant une salle quasiment vide pendant le Covid.

Le livre qui a changé ma vie ? 
EK : Les lettres à un jeune poète de W.M. Rilke d’abord, mais sincèrement… il y en a tant ! Bakita de Véronique Olmi, La rivière et son secret de Zhu Xiao Mei, les nouvelles de S. Zweig…
LF : Je ne dirais pas qu’un livre ait changé ma vie, mais l’Alchimiste de Paolo Coelho m’a fait repenser ma vision de la notion de Destin.

Le chanteur du passé avec lequel j’aurais aimé me produire.
EK : Il y en a beaucoup, mais je dirais Lisa della Casa ou Janet Baker même si elle est encore vivante.
LF : Christiane Edda-Pierre et Alfredo Kraus.

Mon plus grand moment de grâce face à une œuvre d’art. 
EK : Je préfère parler de l’état de grâce qui m’a donné envie de chanter : enfant, découvrir pour la première fois la Passion selon Saint-Jean de Bach dirigée par Bertrand de Billy. Ce chef d’œuvre, interprété de la sorte, m’a transporté très loin.
LF : Mon moment de grâce ce situe également hors de la sphère picturale. Il s’agit de la première fois que je suis entré à L’Opéra Garnier. Cet incroyable escalier, cette salle magnifique… C’est un sublime écrin d’or et de velours qui fait battre le cœur plus fort.

La ville où je me sens chez moi ? 
EK : Je me sens chez moi partout où les relations humaines sont harmonieuses.
LF : Là où je suis né, à Cayenne. J’ai besoin d’y retourner très régulièrement.

La ville qui m’angoisse ? 
EK, LF, unanimes : Aucune !

Le metteur en scène dont je me sens le plus proche ? 
EK : Moche Leiser et Patrice Caurier ont transformé ma vie d’interprète.
LF : Mariam Clément, Jean-François Sivadier ou Laurent Pelly qui ont pourtant des esthétiques très différentes.

Mon pire souvenir avec un chef ? 
EK : Un jour, un chef m’a fait appeler par le régisseur dans sa loge à l’entracte d’un spectacle pour se livrer à des allusions déplacées, assez perturbantes. J’ai mis plusieurs jours à me « rincer » de cela. Ce genre de comportement, souvent insidieux, reste fréquemment invisible pour les autres.

LF : Il y a longtemps que j’ai demandé à mon agent de refuser tout contrat pour moi si c’était pour un opéra sous la direction d’un certain chef qui, pour asseoir son autorité, choisi toujours un chanteur ou deux – cela n’a jamais été moi, heureusement – et passe la production à leur hurler dessus et les reprendre sans raison. Ces scènes de despotisme, d’humiliation et de harcèlement je refuse de les vivre ou d’en voir des collègues victimes. J’ai, en général très peu de colère en moi, mais cette bêtise là me rend furieux. Je ne fais pas ce métier pour souffrir ou voir des collègues peiner à cause d’imbéciles. Bon… Il fallait que ça sorte, excusez-moi.

Le chef ou la cheffe qui m’a le plus appris ? 
EK : Michel Corboz. Il m’a enseigné ce que j’appellerais la voie de l’âme
LF : Alain Altinoglu. Il a été pendant des années mon pianiste accompagnateur au conservatoire de Paris. Il avait 20 ans et déjà cette facilité à permettre aux chanteurs de dépasser les obstacles vocaux sans jamais parler technique. Toujours simple, limpide et bienveillant.

À part chanter, ce que j’ai dû faire de plus compliqué sur scène ? 
EK : Trouver en moi l’endroit où nait la pulsion de violence physique, afin de la transposer envers quelqu’un d’autre de la manière la juste dans mon jeu d’actrice. Je me suis rendu compte que ce n’était vraiment pas dans ma nature et donc très difficile.
LF : Un metteur en scène m’a demandé de commencer mon air les bras écartés et de le finir avec les mains jointes. Ce mouvement devait être quasi imperceptible. Je passais donc tout mon air à calculer si j’allais trop vite ou trop pas assez, et surtout à tétaniser !

Si je pouvais apprendre un instrument du jour au lendemain, lequel serait-il ?
EK : Pourquoi pas apprendre la harpe afin de m’accompagner à l’exemple de Sophye Soliveau, dont j’adore le travail.
LF :Cela fait deux ou trois ans que j’ai envie de m’inscrire dans un conservatoire pour m’initier à la trompette, mais comme je ne trouve pas le temps…. Du jour au lendemain ce serait bien.

Un opéra dont j’aurais voulu être le créateur du rôle-titre ? 
EK : Blanche de la Force dans le Dialogue des Carmélites.
LF : Ce n’est pas le rôle-titre, mais j’aurais bien aimé être le premier Pedrillo…. Pourquoi pas avec Christiane Edda-Pierre (en Constance) et Alfredo Kraus (en Belmonte).

Le chanteur du passé dont l’écoute m’a le plus appris ? 
EK : Christine Schäefer. Je l’ai énormément écoutée et j’ai beaucoup appris de son art pendant mes années étudiantes.
LF : Alfredo Kraus…. Oui je sais, ça fait trois fois que je le cite.

Le chanteur du présent que je trouve d’une générosité rare ?
EK : Nora Gubisch. Généreuse, tant sur scène que dans la vie – après Loïc Félix évidemment -.
LF :  Je pourrais en citer plusieurs, mais quelqu’un comme Brandon Jovanovich est assez étonnant de générosité et de disponibilité – après Elodie Kimmel naturellement -.

Si j’étais un personnage de Disney ? 
EK : La princesse Mérida dans Rebelle.
LF : Baloo… Parce qu’il en faut peu pour être heureux.

Mon plus grand moment d’embarras ? 
EK : Il y en a eu beaucoup et en même temps aucun ! La scène et la représentation de soi est vraiment le meilleur moyen pour apprendre que le ridicule ne tue pas.
LF : Je sors de ma loge en courant, j’entre en scène vraiment de justesse et je me rends compte au bout de cinq secondes que je suis rentré… sans ma perruque. Heureusement, c’était celle de Basilio dans le finale du IV des Noces de Figaro, je n’étais donc pas au premier plan. J’ai essayé de sortir à reculons, plus ou moins discrètement, pour la chercher.
J’ai aussi un autre problème; Cela m’arrive rarement mais cela m’arrive : je suis incapable de maîtriser un fou rire.

Le compositeur auquel j’ai envie de dire « mon cher, ta musique n’est pas pour moi » ? 
EK : Wagner, taillé trop large pour mon instrument, je crois !
LF : Lequel précisément, je ne sais pas, mais c’est forcément un compositeur de musique contemporaine.

Ma personnalité historique préférée. 
EK : Il y a beaucoup de personnalités qui m’inspirent. Vous me poseriez la question demain, je citerais peut-être d’autres noms. Pour aujourd’hui, il y a par exemple – certaines sont encore de ce monde, hourrah! – Ghandi, Simone Weil, Maya Angelou, Roberta Flack, Margaret Atwood…
LF : Victor Schoelcher.

Si l’étais un Lied ou une Mélodie.
EK : « Du Bist die Ruh », un poème de F. Rückert mis en musique par F. Schubert.
LF : Tout le cycle Songs of Travel de Vaughan Williams ainsi que la chanson de la mort de Don Quichotte de J. Ibert.

Mon pire souvenir historique des 40 dernières années. 
EK : Les attentats du 13 novembre 2015. J’ajouterais que ces derniers temps beaucoup d’événements sont très alarmants.
LF : Les attentats du 13 novembre 2015 et la période Covid.

Le rôle que je ne chanterai plus jamais. 
EK : Le rôle qui a marqué mes débuts à Glyndebourne : Emmie dans Albert Herring de Britten
LF : Euuuuh… Non, je veux bien continuer à les chanter tous.

Ma devise.
EK : « La vie ce n’est pas attendre que l’orage passe, c’est apprendre à danser sous la pluie »
LF : Le mieux est l’ennemi du bien… ou encore, ne rien souhaiter que l’on ait déjà.

Pour en savoir plus :
www.loicfelix.com (également présent sur Youtube)
www.elodiekimmel.fr (également présente sur Youtube en solo et avec le duo Ormaie)

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