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Michael Spyres & Il Pomo d’Oro – Ravello

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Spectacle
29 août 2025
Suprême Spyres

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Détails

Georg Friedrich Haendel : « Empio, per farti guerra » (Tamerlano)
Antonio Vivaldi : « Cada pur sul capo audace » (Artabano, re de Parti)
Antonio Vivaldi : Concerto in Sol minore per archi e basso continuo RV 156
Baldassare Galuppi : « Vil trofeo dun alma imbelle » (Alessandro nell’Indie)
Baldassare Galuppi : Concerto a quattro n° 3 in Re maggiore
Gaetano Latilla : « Se il mio paterno amore » (Siroe, Re di Persia)
Nicola Porpora : «Nocchier, che mai non vide l’orror della tempesta » da Germanico in Germania
Domenico Sarro : « Fra l’ombre un lampo solo » (Achille in Sciro)
Giuseppe Sammartini : Concerto grosso in La maggiore op. 2 n. 1
Johann Adolf Hasse : « Solcar pensa un mar sicuro » (Arminio)
Antonio Maria Mazzoni : « Tu m’involasti un regno » (Antigono)

Bis

Georg Friedrich Haendel : « Dread the Fruits of Christian Folly » (Theodora)

Michael Spyres, baritenor

Il Pomo d’Oro
Direction musicale et clavecin
Francesco Conti

Ravello, Villa Rufolo, dimanche 24 septembre 2025, 20h

Ravello, la séduction

La 73e édition du Festival de Ravello se concluait ce 25 août, après deux mois d’une programmation particulièrement impressionnante, tant pour la qualité des phalanges orchestrales, que la stature des artistes présents. Ravello, perle de la Campanie, n’a guère été présent dans nos colonnes alors que le rendez-vous estival proposé chaque année vaut très largement le détour et que cette localité perchée au-dessus du golfe de Salerne a inspiré tant d’artistes, à commencer par Richard Wagner, qui en 1880 y a découvert le modèle tant recherché pour le jardin de Klingsor. Du côté des écrivains, on peut citer Boccace, Gide, qui écrit qu’à Ravello on se sent « suspendu entre le ciel et la terre, mais bien plus près du ciel » (1), Virginia Woolf, Truman Capote, Italo Calvino, Vita Sackville-West, Gore Vidal, Tennesse Williams…Ravello n’a pas manqué de séduire aussi Rudolf Noureev, Leopold Stokowski, John Houston ou Greta Garbo.

Alors que le festival se tenait habituellement dans les jardins de la Villa Rufolo, l’architecte brésilien Oscar Niemeyer a conçu un auditorium couvert d’une capacité de 400 places, inauguré en 2010. Mais c’est le Belvédère de 700 places en plein air qui accueille généralement le public, offrant une vue à couper le souffle (mozzafiato en italien) sur la Méditerranée, 374 mètres en contrebas.

C’est là que pour son avant-dernière soirée, le festival avait invité Michael Spyres et l’ensemble Il Pomo d’Oro, conduit par le claveciniste Francesco Corti.

Contra-tenor

Le chanteur américain s’est déjà produit à Ravello en 2021, à l’occasion du centenaire de Caruso, – avec Lawrence Brownlee et Juan Diego Flórez. Il a voulu pour cette deuxième apparition présenter son formidable album Contra-tenor, jamais encore proposé sur une scène italienne. Cet album met en lumière l’art du belcanto napolitain et illustre l’écriture virtuose de compositeurs méconnus tels que Latilla, Sarro ou Mazzoni, à côté d’autres grands noms du répertoire. Cet enregistrement a enthousiasmé Clément Demeure qui lui a décerné un Swag. Notons au passage que les trois derniers CDs de Spyres ont décroché la récompense suprême accordée par ForumOpera.

Pour le concert de ce soir, les huit pièces vocales proviennent toutes de cet album. Il Pomo d’Oro proposent quant à lui 3 intermèdes instrumentaux qui donnent au ténor/contra-ténor/baryténor l’occasion de souffler un peu dans un programme redoutablement exigeant.

Il Pomo d’Oro, version chambriste

Bien naturellement, pour l’auditeur un peu curieux et a fortiori le critique consciencieux, l’écoute préalable du CD offre un point de repère. Et il saute immédiatement aux oreilles que les forces instrumentales rassemblées sur la scène de Ravello sont nettement réduites par rapport au brillant support orchestral que le disque propose. Il n’y a plus ici qu’un musicien par pupitre et l’ensemble ne compte que sept instrumentistes : 2 violons, 1 alto, 1 violoncelle, 1 contrebasse, 1 théorbe et le clavecin du chef. On peut supposer que cette réduction est motivée par des raisons économiques. Sur le disque, outre des pupitres de cordes bien garnis, hautbois, basson et cors viennent régulièrement renforcer le tissu orchestral et apportent au soliste un soutien nettement plus grandiose. De plus, ce n’est pas en plein air que le son du violon s’épanouit le mieux, surtout lorsque les pupitres sont réduits à une seule unité. Pour pallier cette difficulté, une légère amplification d’appoint a été mise en place, mais cet exercice est encore plus périlleux qu’une amplification complète. Les basses et le clavecin sont ainsi perçus à gauche, alors que les violons, trop éloignés des micros, sont perçus uniquement en son direct. La spatialisation qui en résulte perturbe ainsi l’écoute.

Il faut toutefois saluer la remarquable qualité des musiciens d’Il Pomo d’Oro qui surmontent ces difficultés et gardent leur cohésion. L’ensemble accompagne efficacement le chant de Spyres, apporte régulièrement des impulsions et des dynamiques qui soutiennent le discours musical.

Formidable Michael Spyres

Une semaine avant son concert à Ravello, Michael Spyres chantait Siegmund (Die Walküre) à Bayreuth, où il était encore l’avant-veille, cette fois dans le rôle de Walther von Stolzing (Meistersinger). Pour souligner la diversité du répertoire qu’il parcourt, notez déjà qu’il chantera Hoffmann (Les Contes d’Hoffmann) du 25 septembre au 5 octobre à l’Opéra-Comique. C’est dire l’étendue des styles qu’il maîtrise avec un talent époustouflant.

© Rosario Caramiello

Dès son air d’entrée Empio, per farti guerra, il déploie toute l’énergie virtuose que requiert cet aria di guerra. Il est clair que lui n’a nul besoin d’être amplifié, sa projection est insolente, les vocalises sont impeccablement détaillées, la diction irréprochable.

Quand vient le Concerto en sol mineur pour cordes de Vivaldi, intermède instrumental, on perçoit pleinement les difficultés acoustiques décrites plus haut. On en admire d’autant plus le dynamisme du ténor qui apporte par son investissement et son plaisir de chanter tout la cohésion nécessaire. Les musiciens d’Il Pomo d’Oro retrouvent leur connivence avec Spyres et le plaisir de l’écoute revient dans sa presque totalité.

Dans l’air extrait de Siroe « Se il mio paterno amore » (Gaetano Latilla) les vocalises atteignent des sommets, avec des sauts répétés d’octave vers le grave, qui démontrent une fois encore comme la tessiture est maîtrisée sur trois octaves, de haut en bas, sans aucune rupture et quasiment sans perte de puissance.

Il enchaîne tous les genres, de l’aria di paragone – le formidable « Solcar pensa un mar sicuro » de Hasse – à l’aria di tempesta, « Nocchier, che mai non vide » du napolitain Porpora. Dans « Vil trofeo d’un alma imbelle » de Galuppi, il nous émeut par sa plainte, portée par une longueur de souffle apparemment sans limite. Il suspend son chant sur un point d’orgue et tient son audience en haleine. Et quand dans la dernière pièce il va chercher dans son registre de fausset une note suraigüe, le public ne se tient plus, et l’applaudira à tout rompre à la fin du concert.

Une magnifique soirée, dans un cadre d’exception.

(1) L'Immoraliste, 1902

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❤️❤️❤️❤️🤍 : Supérieur aux attentes
❤️❤️❤️🤍🤍 : Conforme aux attentes
❤️❤️🤍🤍🤍 : Inférieur aux attentes
❤️🤍🤍🤍🤍 : À oublier

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Baldassare Galuppi : Concerto a quattro n° 3 in Re maggiore
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Giuseppe Sammartini : Concerto grosso in La maggiore op. 2 n. 1
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Ravello, Villa Rufolo, dimanche 24 septembre 2025, 20h

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