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MOZART, Don Giovanni – Compiègne

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Spectacle
2 décembre 2025
Viva la libertà ?

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Dramma Giocoso en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Lorenzo Da Ponte
Créé le 29 octobre 1787 à Prague
Production Arcal, coproduction Athénée Théâtre Louis-Jouvet (Paris) • Opéra de Massy • Le Concert de la Loge.

Détails

Mise en scène
Jean-Yves Ruf
Scénographie
Laure Pichat
Costumes
Claudia Jenatsch
Lumières
Victor Egéa

Don Giovanni

Anas Séguin
Leporello
Adrien Fournaison
Donna Elvira
Margaux Poguet
Donna Anna
Chantal Santon Jeffery
Don Ottavio
Abel Zamora
Zerlina
Michèle Bréant
Masetto
Mathieu Gourlet
Le Commandeur 
Nathanaël Tavernier

Chœur (Inès Lorans, Alexia Macbeth, Corentin Backès, Samuel Guibal)
Concert de la Loge
Direction musicale et premier violon
Julien Chauvin

Compiègne, Théâtre Impérial, samedi 29 novembre 2025, 20h

Sacré « chef-d’œuvre des chefs-d’œuvre » par France Musique dans les années 1960, Don Giovanni n’a rien perdu de son attrait, mais se trouve aujourd’hui confronté à toute une fraction de la population qui à juste titre n’admet plus le libertinage non consenti. L’œuvre de Mozart et Da Ponte n’est pas directement construite sur ce principe, mais peut s’y conformer, comme le montre la production mise en scène par Jean-Yves Ruf, qui tourne en France depuis un an.

Accueillie avec grand enthousiasme (voir les comptes rendus de Clément Taillia de novembre 2024 et celui de Christian Peter d’octobre 2025), elle se plie maintenant à quelques variantes de distribution présentes ce soir au Théâtre Impérial de Compiègne. Le principe reste le même : l’orchestre occupe quasiment toute la scène, et les chanteurs se déplacent entre les musiciens jusqu’à l’avant-scène où ils trouvent un plus grand espace de liberté, et une passerelle en fond de scène à laquelle ils accèdent par un petit escalier. Quelques rideaux variés montent et descendent, bref tournée oblige, c’est du léger, pas de danse villageoise, par de banquet, pas de statue du Commandeur, tout repose sur les protagonistes.

Deux d’entre eux sont de fait véritablement exceptionnels. D’abord l’orchestre Le Concert de la Loge et son chef, Julien Chauvin, qui le dirige du violon. Dès le départ, le ton est donné, le noir se fait brutalement et l’orchestre démarre au quart de tour, prenant les spectateurs par surprise. Le rythme effréné ne faiblira pas un instant, entraînant Don Giovanni dans une irrésistible course à l’abîme. Car, période oblige, le chef « ne tente pas d’excuser Don Giovanni » et au contraire veut le rendre « moins puissant, plus pathétique ».

Margaux Poguet (Donna Elvira) et Adrien Fournaison (Leporello) © Photos Arcal / Simon Gosselin

Autre élément central de la représentation, le Leporello d’Adrien Fournaison. On est loin des grands titulaires du passé, de Giuseppe Taddei à Gabriel Bacquier en fin de carrière, qui jouaient plus les Sancho Panza. Ici, Leporello, affublé d’un drôle de pantalon trop court, est léger, virevoltant, menant le jeu, c’est un véritable personnage de premier plan mais en même temps sans exagérations, d’une grande sobriété. Son air du catalogue est notamment un régal, et la manière dont il pointe devant Donna Elvira le nombre des conquêtes de son patron, avec tour à tour délice, respect, surprise feinte et amusement n’est peut-être pas du « politiquement correct », mais constitue un délice théâtral. La voix est ample et chaude, l’articulation parfaite, bref, l’un des grands titulaires actuels du rôle.

Aux dires de Jean-Yves Ruf, qui lui non plus ne cherche en rien à l’excuser, Don Giovanni n’est « ni un héros ni une crapule ». Interprété ce soir par Anas Séguin, plus « loubard des banlieues » que grand seigneur (Cesare Siepi, Gérard Souzay, Gabriel Bacquier, Ruggero Raimondi), il n’est pas sans faire penser au Don Giovanni de Peter Sellars, à la différence près que celui-ci était doublé d’un « frère » Leporello, dans une production qui marqua à la fin des années 1980 un des grands tournants de la mise en scène d’opéra. Ce soir, Anas Séguin paraît surtout prendre ses marques, et continuer à creuser les facettes du personnage, devant des choix non encore fermement tranchés. La voix est bien adaptée au rôle, il lui reste simplement à assumer une présence scénique plus affirmée.

On retiendra du reste de la distribution une grande unité musicale et de jeu scénique d’un grand naturel. Michèle Bréant est une Zerline toute de finesse et de légèreté vocale, Abel Zamora un Don Ottavio à la belle ligne mélodique, Mathieu Gourlet un Masetto sonore bien dans la tradition, et Nathanaël Tavernier un Commandeur d’excellente facture. Chantal Santon Jeffery est une Donna Anna torturée mais très musicale, et Margaux Poguet une Donna Elvira parfois un peu outrée, et qui arrive fatiguée à son dernier air.

Pour autant, quelques autres bémols viennent un peu affaiblir l’enthousiasme né des partis pris scéniques et musicaux. La faiblesse de l’éclairage à l’avant-scène, contrairement à la passerelle, fait qu’on ne découvre vraiment les chanteurs qu’au moment des saluts. L’absence de chœurs un peu plus nourris, remplacés par quatre excellents solistes, se fait sentir (noce de Zerline), tandis que d’autres ensembles, comme le « Sola, sola in buio loco » peinent un peu à rester structurés.
Jouer une seule fois en un lieu que l’on découvre n’est pas un exercice sans risques. Il n’en reste pas moins que cette course à la vie, course à la mort, ne laisse personne indifférent, après une magnifique scène finale qui glace comme il se doit, malgré les feux de l’enfer, entrainant une longue ovation.

Prochaines représentations à Massy (13, 14 et 16 décembre), Tourcoing (17 et 18 janvier 2026), Foix (10 avril), Perpignan (12 avril) et Clermont-Ferrand (25 et 26 avril).

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Dramma Giocoso en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart, livret de Lorenzo Da Ponte
Créé le 29 octobre 1787 à Prague
Production Arcal, coproduction Athénée Théâtre Louis-Jouvet (Paris) • Opéra de Massy • Le Concert de la Loge.

Détails

Mise en scène
Jean-Yves Ruf
Scénographie
Laure Pichat
Costumes
Claudia Jenatsch
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Victor Egéa

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Nathanaël Tavernier

Chœur (Inès Lorans, Alexia Macbeth, Corentin Backès, Samuel Guibal)
Concert de la Loge
Direction musicale et premier violon
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Compiègne, Théâtre Impérial, samedi 29 novembre 2025, 20h

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