C’est pour le théâtre des Bouffes Parisiens, à l’intention de la divette Anna Judic, que Jacques Offenbach composa en 1874 Bagatelle, une opérette en un acte. « M. Offenbach a écrit une musique charmante. Peu ou pas de bouffonnerie mais beaucoup d’élégance et de grâce », commentait le critique Henri Lavoix au lendemain de la première. Si le texte peut sembler parfois un peu long, la satire du monde des cafés-concerts étant assez éloignée de nos préoccupations contemporaines, le trio des ronflements ou la « ronde de l’amitié » mériteraient une place de choix dans toute anthologie offenbachienne.
Dans le cadre du Festival « Opéra en un acte », la compagnie Fortunio sortait de ses murs les 12 mars et 18 avril derniers afin d’offrir au public du Ranelagh à Paris une version pour piano (Romain Vaille) et clarinette (Elise Pruvost) de cette pièce rare. Comme à chaque fois, le soin apporté tant à la musique qu’aux costumes, décor (Geoffroy Bertran) et mise en scène (Pierre Catala) fait de cette découverte un moment délicieux. Très en voix et en beauté, Charlotte Mercier se glisse avec une aisance non dépourvue de drôlerie dans le rôle de Bagatelle, conçu aux dimensions sans doute plus modestes d’Anna Judic. Xavier Meyrand (Pistache) et Julie Furton (Finette) sont deux joyeux drilles et le joli mezzo de Mathilde Rossignol (George) rappelle le lien qu’il existe entre Offenbach et Mozart. La maladresse amoureuse du jeune Planteville n’est en effet pas si éloignée de celle de Cherubino dans Le nozze di Figaro.
En deuxième partie, Marie-Amélie Tek, Geoffroy Bertran et Christophe Doinel, trois des piliers de la Compagnie, rejoignent la fine équipe pour Un souper chez Offenbach. Comme précédemment, l’adjectif « délicieux » est le plus adapté pour qualifier l’interprétation de ce pastiche, qualificatif d’autant plus à propos qu’il s’agit d’une « fantaisie culinaire » élaborée à partir d’airs et ensembles gourmands picorés dans l’œuvre d’Offenbach (qui en regorge). Prochain et dernier rendez-vous du festival « Opéra en un acte », toujours au Ranelagh : L’Enfant et les sortilèges le dimanche 30 avril à 11h30.
© Florian Boisquillon