S’il n’est pas neuf, le genre de l’abrégé de musique (ou quel que soit sa désignation) reste difficile à concevoir et périlleux à rédiger. Comment trouver le juste milieu entre vulgarisation théorique et exigence intellectuelle, comment résumer en quelques dizaines de pages plusieurs siècles d’histoire de la musique et, finalement, pourquoi vouloir compiler en un seul livre ce qui se trouve plus exhaustivement exposé dans les traités d’harmonie, manuels d’analyse et autres guides en tout genre ?
La réponse à cette dernière interrogation se trouve dans le type de lectorat visé par l’auteur. Frédéric Platzer, professeur d’éducation musicale et journaliste (collaborateur de Forumopera.com, notamment) s’adresse prioritairement un à public d’étudiants ou de professeurs cherchant un outil pratique et utile au quotidien. En ce sens, son Abrégé est une totale réussite de pédagogie. Si le livre, quel qu’il soit, n’est pas suffisant pour apprendre le solfège ou la musique, il est un outil précieux pour approcher de plus près la théorie musicale ; ce qui rendra celui-ci également indispensable au fameux « mélomane de bonne volonté » souhaitant comprendre un peu mieux la substance première de l’objet de sa passion. Du système zarlinien à l’accord de septième de sensible en passant par la structure de la forme sonate, l’évolution de la polyphonie et les fichiers MIDI, tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la musique (ou presque) sans jamais oser le demander se trouve consigné et expliqué ici. Certes, d’autres guides modernes abordent certaines de ces questions plus en profondeur (c’est le cas des ouvrages de Claude Abromont ou d’Ulrich Michels parus chez Fayard). Cependant, Platzer se distingue par une approche pédagogiquement claire et décomplexée, particulièrement agréable à lire et/ou à consulter.
Illustré de très nombreux exemples musicaux (reproduits avec beaucoup de soin), cet ouvrage donnera certainement envie à ses lecteurs estudiantins d’aller plus loin dans leur exploration d’un art rendu très vivant par l’auteur. On pourra certes discuter quelques détails mineurs (il n’est pas – ou plus – correct d’écrire que, dans le cas de Vivaldi, « s’il est un domaine finalement encore en friche, c’est celui de l’opéra » alors qu’en récital, au théâtre et au disque, les œuvres lyriques du Prêtre Roux font recette comme jamais, Spinosi, Bartoli et consorts étant passés par là) mais l’ensemble est parfaitement documenté et idéalement structuré. Dans le genre du « tout en un », on n’avait pas fait aussi bien depuis Albert Lavignac en…1896 (La Musique et les Musiciens*) – livre qui a beaucoup moins mal vieilli que bien des ouvrages de son époque ! Voici donc le maître achat en la matière.
* A lire en ligne sur Gallica (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k200945f.pdf).