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ROSSINI, Cendrillon – Versailles

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Spectacle
13 octobre 2025
Une fête totale

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Melodramma giocoso en deux actes
Musique de Gioachino Rossini
Livret de Jacopo Ferretti d’après le drame semiserio de Stefano Pavesi Agatina o La Virtù premiata
Traduction française de Louis-Ernest Crevel de Charlemagne (1868)

Création à Rome, Teatro Valle, le 25 janvier 1817

Détails

Mise en scène, chorégraphie, décors, costumes et lumières
Cécile Roussat
Julien Lubek
Assistant scénographe
Sébastien Thouvenin

Cendrillon
Gaëlle Arquez
Don Rodolphe
Patrick Kabongo
Éléonore
Gwendoline Blondeel
Isabelle
Éléonore Pancrazi
Perruchini
Jean-Gabriel Saint-Martin
Fabio
Alexandre Baldo
Don Magnifico
Alexandre Adra

Orchestre et Chœurs de l’Opéra Royal
Direction musicale
Gaëtan Jarry

Versailles, Opéra Royal
Samedi 11 octobre 2025, 19h

Depuis plusieurs productions – le récent Enlèvement au sérail en étant une éclatante illustration – l’Opéra Royal de Versailles et son directeur Laurent Brunner réussissent une véritable quadrature du cercle : allier une approche musicologique exigeante, avec l’usage d’instruments anciens, à un véritable esprit de troupe et des mises en scène de qualité accessibles à tous. Le tout se traduit chaque fois par un succès public, de quoi inspirer plus d’une maison lyrique prestigieuse. La Cendrillon présentée ce soir en offre un nouvel exemple.

La mise en scène de Cécile Roussat et Julien Lubek, déjà présentée à Liège en 2019, retrouve son éclat visuel et son esprit de jeu. Les metteurs en scène façonnent un univers de conte animé, où chaque détail participe d’une mécanique poétique parfaitement réglée. Le décor mobile, conçu sur un plateau tournant, fait défiler les lieux de l’action comme les scènes d’un rêve éveillé. L’espace se métamorphose sans rupture, du logis délabré de Don Magnifico au palais du Prince, avec une fluidité constante. Des acrobates et mimes assurent les transitions, prolongeant la fantaisie et l’énergie du spectacle.

Les costumes, mêlant raffinement et excentricité, rappellent que Rossini aime la caricature autant que la grâce. Le duo s’appuie sur une gestuelle précise, presque chorégraphiée, qui relie le chant à l’action. L’humour s’impose par touches légères, dans des trouvailles visuelles qui maintiennent l’attention du spectateur. Sous ce foisonnement, la dimension morale du livret s’atténue : la bonté triomphante devient une célébration joyeuse plus qu’un message édifiant. La magie, omniprésente, supplante la gravité sans altérer la cohérence du récit. La direction d’acteurs reste rigoureuse et veille à la clarté des ensembles vocaux. Le résultat tient autant du théâtre musical que du cirque poétique. Tout converge vers un enchantement réglé au millimètre, où précision et légèreté se répondent dans une même idée.

La réussite de ce spectacle vient aussi du soin apporté à l’exécution musicale, et notamment dans des ensembles restitués avec une netteté exemplaire. En ce sens, l’écrin parfait de l’Opéra Royal permet à chacun, musicien et chanteur, de s’exprimer sans avoir à forcer le trait. On se rend ainsi compte, une nouvelle fois, à quel point jouer Rossini dans des salles de la taille de l’Opéra Bastille ou du Metropolitan Opera s’avère problématique. Sous la direction rigoureuse et pétillante de Gaëtan Jarry, la musique épouse parfaitement la mise en scène. Le chef accompagne également au pianoforte, et de la plus belle des façons, les récitatifs, intervenant en outre dans certains passages orchestraux. De l’impeccable Ouverture jusqu’à l’orage endiablé, les instrumentistes de l’Orchestre de l’Opéra Royal méritent tous les éloges : belles couleurs dans les tutti, transparence dans les passages plus chambristes. Au-delà de l’extrême fiabilité des cordes, on retient la qualité des vents, très exposés on le sait chez Rossini : flûte et piccolo de Julie Huguet, hautbois de Michaela Hrabankova, clarinette de José Antonio Salar Verdú. Mention spéciale également aux choristes, dont certains sont issus de l’Académie de l’Opéra.

Il faut un peu de temps pour s’habituer au texte en français, adapté par Louis-Ernest Crevel en 1868, qui fonctionne finalement très bien et respecte le ton enlevé de l’œuvre. Dans le rôle-titre, Gaëlle Arquez séduit par l’ampleur souple de son mezzo, déployant comme toujours des trésors de musicalité, avec une virtuosité précise et jamais forcée. Le Rondo final, mené avec un art du phrasé irréprochable, semble toutefois un rien trop prudent. Malgré une projection plus limitée, le Prince de Patrick Kabongo impressionne par sa vaillance et son aisance scénique, les vocalises fusent, tout comme les aigus, sans effort apparent. Jean-Gabriel Saint-Martin campe un Dandini (ici nommé Perruchini) irrésistible, à la projection royale et à la précision millimétrée dans les coloratures. Alexandre Baldo, pour son premier Rossini scénique, fait forte impression en Alidoro (ici Fabio) : beauté du legato, richesse du timbre et aisance de la vocalise, héritée du baroque. Alexandre Adra prête à Don Magnifico un chant solide et une présence scénique d’un comique savoureux. Et que dire enfin du luxe absolu d’avoir, dans le rôle des sœurs, les ébouriffantes Gwendoline Blondeel et Éléonore Pancrazi, aussi justes dans la bouffonnerie que dans la précision des ensembles, apportant autant de rires au public que de cohésion au plateau !

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❤️❤️❤️❤️❤️ : Exceptionnel
❤️❤️❤️❤️🤍 : Supérieur aux attentes
❤️❤️❤️🤍🤍 : Conforme aux attentes
❤️❤️🤍🤍🤍 : Inférieur aux attentes
❤️🤍🤍🤍🤍 : À oublier

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Melodramma giocoso en deux actes
Musique de Gioachino Rossini
Livret de Jacopo Ferretti d’après le drame semiserio de Stefano Pavesi Agatina o La Virtù premiata
Traduction française de Louis-Ernest Crevel de Charlemagne (1868)

Création à Rome, Teatro Valle, le 25 janvier 1817

Détails

Mise en scène, chorégraphie, décors, costumes et lumières
Cécile Roussat
Julien Lubek
Assistant scénographe
Sébastien Thouvenin

Cendrillon
Gaëlle Arquez
Don Rodolphe
Patrick Kabongo
Éléonore
Gwendoline Blondeel
Isabelle
Éléonore Pancrazi
Perruchini
Jean-Gabriel Saint-Martin
Fabio
Alexandre Baldo
Don Magnifico
Alexandre Adra

Orchestre et Chœurs de l’Opéra Royal
Direction musicale
Gaëtan Jarry

Versailles, Opéra Royal
Samedi 11 octobre 2025, 19h

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