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Charpentier, Lambert, Rameau — Paris (Pleyel)

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Spectacle
10 septembre 2008
Auprès du feu, l’on fait l’amour

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Marc-Antoine Charpentier

Ouverture de Médée

Michel Lambert
Air « Ma bergère est tendre et fidèle »
Air « Ombre de mon amant »

Marc-Antoine Charpentier
Concert à quatre parties (extraits)
Air « Ruisseau qui nourris dans ce bois »
Prélude instrumental et chansonnette « Auprès du feu l’on fait l’amour »
Chanson à danser « Celle qui fait mon tourment »

Médée (extraits)

Jean-Philippe Rameau
Hippolyte et Aricie (extraits)
Les fêtes d’Hébé ou les Talens lyriques (extraits)

Anne Sofie von Otter : mezzo-soprano

Les Arts Florissants
William Christie : direction

Mercredi 10 septembre 2008, Salle Pleyel, Paris

C’est une soirée presque ordinaire, entre amis ou membres d’un club. Une soirée où la chanteuse suédoise, espiègle et souriante, s’en donne à cœur joie devant un chef d’orchestre goguenard et amusé. Le programme, chronologique, était assez nettement construit entre une première partie consacrée aux airs de cour intimistes et précieux avec quelques passages instrumentaux, et une seconde plus grave dédiée à des extraits de tragédies lyriques ou opéra-ballet.

Après l’ouverture de Médée, un peu étriquée et avec une forte emprise des graves due à l’acoustique de la salle, William Christie est revenu s’asseoir, tel un spectateur privilégié qui aurait envahi la scène, le sourire aux lèvres. Et Anne-Sofie von Otter entame deux charmants airs de cour du beau père de Lully, Michel Lambert (que les Arts Flo avait enregistré voici presque 30 ans). « Ma bergère est tendre est fidèle », construite sur un rythme de chaconne, perd de sa suggestivité insidieuse car la chanteuse joue excessivement la comédie, raconte une saynète au risque de bousculer la diction et les articulations, insiste sur l’humour du texte en roulant de gros yeux sur les « Mais hélas, (…) elle aime son troupeau, sa houlette et son chien ». A l’inverse, les plaintes amoureuses de « Ombre de mon amant », tout en pudeur, avec une messa di voce impeccable, et un accompagnement d’une rétive tendresse duquel émerge un théorbe de Brin Feehan, se sont révélées des plus touchantes. Même constat inégal chez Charpentier : si « Ruisseau qui nourris dans ce bois » de Charpentier a souffert d’une voix tendue et d’un souffle court, le grivois « Auprès du feu l’on fait l’amour » a remporté un franc succès, Anne-Sofie von Otter, totalement libérée, n’hésitant pas à taper du talon ou jouer des épaules devant un Bill médusé et admiratif. On retrouve la même fougue et la même vitalité dans « Celle qui fait mon tourment » scandé avec malice et détachement, comme si la belle Suédoise s’excusait de tant de fadaises galantes.

Il faut tout de même avouer la réussite de ce concert a reposé non pas sur ces mignardises (quoique l’air à boire de Charpentier ait vraiment soulevé l’enthousiasme) mais sur les extraits de tragédies lyriques, en particulier de Médée. Diva caméléon, von Otter a su en un instant troquer son espièglerie ironique pour l’habit de lumière des grandes et nobles figures si chères à ce répertoire. William Christie peut alors reprendre les rênes des Arts Flo, tendre un tapis de cordes grainé et vibrant, lier subtilement les bois à ce substrat dense et d’une puissante théâtralité. Et la mezzo donne alors son meilleur. Exit les aigus tirés, les hoquets, et autres changements intempestifs de mesure, voici apparaître la grande figure tragique, inaccessible aux simples mortels, meurtrière tiraillée entre le désir et le remord, trop malheureuse aimante. La diction est impeccable, le chant altier, profond. On reste scotché à son fauteuil, presque attendri devant l’aveu d’un amour trahi « Quel prix de mon amour, quel fruit de mes forfaits ». Anne-Sofie von Otter a compris que la tragédie lyrique est avant tout la scène du théâtre des passions, brosse avec une économie de moyens remarquable un portrait psychologiquement très complexe. De désespérée, la chanteuse se fait vite vengeresse, violente, brutale mais avec cette touche d’élégance d’irrésistible femme fatale (« Noires filles du Styx »). Les autres extraits de Rameau dénotent la même classe, le même engagement, en particulier le « Quelle plainte en ces lieux m’appelle » d’Hyppolyte et Aricie qui prouve – si besoin était – le penchant de von Otter pour les coupables torturées. Trois bis ont répondu à une ovation triomphale du public, subjugué, parmi lesquels se trouvait un superbe air non identifié sur une basse de chaconne : « Je chéris bien mon sort même s’il est rigoureux ».

Ajoutons enfin que ce programme devrait faire l’objet d’un enregistrement, et que l’on se dit qu’Anne-Sofie von Otter aurait fait une parfaite Armide lullyste…

Viet-Linh NGUYEN

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Air « Ruisseau qui nourris dans ce bois »
Prélude instrumental et chansonnette « Auprès du feu l’on fait l’amour »
Chanson à danser « Celle qui fait mon tourment »

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Mercredi 10 septembre 2008, Salle Pleyel, Paris

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