Encore un état au bord de la faillite ! Pas de panique, c’est de la principauté du Pontevedro qu’il s’agit. Vous l’avez reconnu, c’est l’Etat de la Veuve joyeuse.
Du coup, le metteur en scène Benoît Bénichou qui a monté cette opérette à Nice a fait ni une ni deux et l’a transposée dans le monde de la crise financière de 2008. Alerte à Wall Street, la veuve débarque à Paris en star d’Hollywood !
Ah, on n’est plus sous les habituels lambris des salons mondains du XIXe mais dans le décor délabré d’une ambassade en ruine. Les platras tombent des murs et du plafond comme à Gravelotte. Attention la tête !
Rassurez-vous, le spectacle est tout sauf sinistre. Benoît Bénichou a réalisé un fantastique travail de traduction et réactualisation du texte. Il l’a taillé à coup de serpe et a supprimé le personnage du fantaisiste Figg. Résultat, une action resserrée avec un texte – en vers, s’il vous plaît – collant parfaitement à la musique.
La scène des grisettes © Dominique Jaussein
Dans cette affaire, les spectateurs deviennent les invités de la réception qui se déroule sur scène. C’est comme si l’Opéra de Nice avait été transformé en ambassade du Pontevedro. On y voit avant le spectacle les chanteurs arriver en Mercedès, sur un tapis rouge, dans le hall d’entrée au milieu du public. Pendant le spectacle il descendent dans la salle. Au cours de l’entracte, ils se mêlent aux spectateurs et chantent même dans les escaliers. La fête à tous les étages !
Le spectacle est truffé de vidéos émouvantes et enveloppé de fabuleux éclairages dus à un magicien de la lumière, Mathieu Cabanes.
Camille Schnoor, la découverte de la soirée © Dominique Jaussein
De la lumière, il y en a aussi dans la voix de l’interprète de la Veuve – une découverte : Camille Schnoor. C’est la première fois que cette Niçoise encore peu entendue en France se produit sur scène dans sa ville natale. On ne vous dit pas son émotion, celle de sa famille, de ses amis ! Ils l’ont connue enfant, ils la retrouvent star. Et avec quelle aisance, quel style, quelle souplesse dans la voix !
Son Danilo de cœur est incarné par Frédéric Cornille. Il n’y a qu’éloge à faire de ce beau baryton à la voix ronde, égale, musicale.
Nous n’avons pas reconnu en Samy Camps le délicieux ténor léger qui avait été naguère distingué aux Victoires de la musique. Sa voix est en train d’évoluer vers un registre plus fort, plus ample. Mais la mutation n’est pas achevée. Attendons…
La délicieuse Amélie Robins n’était pas, au soir où on l’a entendue, dans sa forme habituelle, présentant un vibrato excessif. Là encore, faisons confiance en l’avenir…
Le très bon Philippe Ermelier est un de ces chanteurs comédiens dont une opérette ne saurait se passer. Il est impayable dans son rôle d’ambassadeur. Ca tombe bien, l’ambassade du Pontevedro n’a plus d’argent !
Un reste de distribution de qualité, un choeur et un orchestre pétillants sous la direction d’un maître es opérette, Bruno Membrey, achèvent de rendre la salle aussi joyeuse que la Veuve. Elle a applaudi à tout rompre cette « Veuve » toute neuve.