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HAENDEL, Ariodante – Paris (Garnier)

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Spectacle
9 mai 2023
Scandale à Balmoral

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Dramma per musica en trois actes

Musique de Georg Friedrich Haendel

Livret anonyme adapté de Ginevra, Principessa di Scozzia d’Antonio Salvi d’après Orlando furioso de Ludovico Ariosto

Création à Londres, Covent Garden, le 8 janvier 1735

Détails

Mise en scène

Robert Carsen

Lumières

Peter van Praet

Décors et costumes

Luis F. Carvalho

Chorégraphie

Nicolas Paul

 

Ariodante

Emily D’Angelo

Ginevra

Olga Kulchynska

Polinesso

Christophe Dumaux

Dalinda

Tamara Banjesevic

Il Re di Scozia

Matthew Brook

Lurcanio

Eric Ferring

Odoardo

Enrico Casari

 

Chef de chœur

Alessandro Di Stefano

Chœurs de l’Opéra national de Paris

The English Concert

Direction musicale

Harry Bicket

Paris, Palais Garnier, le dimanche 7 mai 2023, 19h

À l’issue de la première d’Ariodante donnée en version concert pour cause de grève, notre confrère se demandait si la mise en scène pourrait insuffler énergie et dramatisme à cette nouvelle production de l’Opéra de Paris. Force est de constater que l’approche de Robert Carsen était le chainon manquant d’une soirée réussie !

Cette mise en scène transpose l’action de l’Écosse médiévale au Royaume-Uni contemporain, situant le drame au sein de la famille Windsor dans leur résidence de Balmoral. Il faut remarquer que le livret porte peu de marque de son époque – si ce n’est le principe des duels, ce qui laisse toute sa place à un tout autre contexte historique. La transposition fonctionne à merveille. Le décor de Luis F. Carvalho est celui d’un immense château royal vert du sol au plafond et paré d’un élégant motif tartan. La scène alterne entre la chambre de Ginevra, son antichambre, le bureau du Roi, la cour du château et sa salle de réception et ce, de manière particulièrement fluide. Les costumes, modernes, font tout de même la part belle aux kilts à la fois somptueux et réalistes.

©Agathe Poupeney

Le metteur en scène multiplie les clins d’œil à la famille royale contemporaine. Ce que les personnages apprennent en principe par lettre, ils l’apprennent ici via la presse à scandale. Les paparazzi harcèlent le Roi et Ginevra, créant parfois d’effroyables tableaux rappelant indéniablement le harcèlement dont Lady Di était victime. Partant de cette idée, le thème de la chasse devient une métaphore structurante : alors que Balmoral est le lieu de chasse privilégié de la famille royale, Ariodante et Ginevra se verront pris en chasse à leur tour, tantôt par Polinesso, tantôt par les paparazzi, comme le soulignent les divers cerfs parsemant la mise en scène, d’abord en liberté puis empaillés dans le hall du château. On retrouve cette thématique durant l’une des scènes dansées, chorégraphiée par Nicolas Paul, lorsque le cauchemar de Ginevra en fait la proie d’une myriade de Polinesso.

Le plateau vocal est d’excellente facture. Emily D’Angelo crève la scène en Ariodante. La facilité avec laquelle les vocalises s’enchaînent en toute fluidité est déconcertante. La pureté de l’émission et la précision du phrasé n’entachent nullement la puissance. Mais c’est surtout sa présence scénique qui est proprement sidérante : la mezzo-soprano canadienne est solaire de générosité et de bonheur dans son premier acte, avant de servir un deuxième acte tout en obscurité. « Scherza Infida » est le sommet de la soirée : en pleine pénombre, la cantatrice multiplie les angles d’attaque – déploration, colère, lamentation, désespoir. Aucune reprise du motif n’est jamais vraiment la même et dix minutes plus tard, le spectateur n’en sort qu’exsangue.

©Agathe Poupeney

La Ginevra d’Olga Kulchynska est également une franche réussite. Le timbre est profond et son approche scénique tout en subtilité, préférant, à l’annonce de la mort d’Ariodante, l’implosion plutôt que l’explosion. De même, sa progression vers la démence est habilement manœuvrée, sans jamais verser dans la caricature. Christophe Dumaux campe un Polinesso tout en perversité et nous gratifie d’aigus aussi précis que puissants. En Dalinda, Tamara Banjesevic offre une performance très convaincante, incarnant le tiraillement entre son amour pour Polinesso et la fidélité à Ginevra. Matthew Brook fait des débuts réussis sur la scène de Garnier, déployant la noblesse escomptée pour le Roi d’Ecosse. Le Lurcanio d’Eric Ferring dispose du bon équilibre entre vaillance et vulnérabilité amoureuse. Enfin, en Odoardo, Enrico Casari complète avec efficacité cette impeccable distribution. Il faut, en dernier lieu, relever que les personnages sont sans cesse en mouvement et que Carsen parvient à éviter l’écueil de l’aria statique face au public, ce qui contribue à la réussite de l’enchantement.

Harry Bicket propose, certes, une vision pour le moins minimaliste de la partition orchestrale. Si le premier acte fait montre d’une platitude certaine, il faut relever que certains contrastes sont par la suite mis en valeur, notamment lors des passages dansés. The English Concert à lui seul ne décolle jamais vraiment, mais il constitue un parfait écrin pour le talent ébouriffant du plateau vocal. Le chœur de l’Opéra national de Paris, dirigé par Alessandro Di Stefan, relève le défi tant vocalement que scéniquement.

Au total, cette production de Carsen, non dénuée d’humour, fonctionne au plan narratif comme au niveau symbolique, tout en étant somptueusement esthétique et servie par un plateau vocal de grande qualité : un quarté gagnant à nos yeux !

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Dramma per musica en trois actes

Musique de Georg Friedrich Haendel

Livret anonyme adapté de Ginevra, Principessa di Scozzia d’Antonio Salvi d’après Orlando furioso de Ludovico Ariosto

Création à Londres, Covent Garden, le 8 janvier 1735

Détails

Mise en scène

Robert Carsen

Lumières

Peter van Praet

Décors et costumes

Luis F. Carvalho

Chorégraphie

Nicolas Paul

 

Ariodante

Emily D’Angelo

Ginevra

Olga Kulchynska

Polinesso

Christophe Dumaux

Dalinda

Tamara Banjesevic

Il Re di Scozia

Matthew Brook

Lurcanio

Eric Ferring

Odoardo

Enrico Casari

 

Chef de chœur

Alessandro Di Stefano

Chœurs de l’Opéra national de Paris

The English Concert

Direction musicale

Harry Bicket

Paris, Palais Garnier, le dimanche 7 mai 2023, 19h

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