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Opéra de Paris : les comptes dans le rouge… A qui la faute ?

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Brève
25 mai 2016
Opéra de Paris : les comptes dans le rouge… A qui la faute ?

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Récemment, le DRH de l’Opéra de Paris a adressé aux collaborateurs de la maison une lettre expliquant qu’ils seraient privés de prime d’intéressement au titre de la saison 2014-2015. Motif : les objectifs financiers de la saison n’avaient pas été atteints. En cause, des recettes de billetterie en chute libre (-5m€ !), des « annulations de spectacle dues à des mouvements sociaux », et « l’impact des attentats sur les spectacles et les visites du Palais Garnier ». La capacité d’autofinancement prévue à 9,2 millions d’euros a ainsi péniblement atteint 5,9 millions.

Aujourd’hui, c’est Stéphane Lissner lui-même qui prend sa plus belle plume pour informer les collaborateurs que la saison 2015-2016 s’annonce financièrement catastrophique. En cause cette fois, les mouvements sociaux ayant conduit à l’annulation de sept spectacles, battant le record historique de l’Opéra de Paris. « D’ores et déjà », écrit Stéphane Lissner, « notre résultat 2016 est dégradé d’environ 2 M€ et il sera impossible de rattraper cet impact budgétaire ». Et le directeur de faire part de la fragilisation générale et durable de l’établissement causée par ces mouvements sociaux : programmes d’investissement remis en cause, artistes découragés, spectateurs dissuadés, tutelles méfiantes…

Certes, ces mouvements sociaux ont un poids considérable dans l’économie de l’Opéra de Paris. On s’interroge néanmoins sur les responsabilités précises pointées par le directeur de l’Opéra, qui par ailleurs n’apporte dans son courrier ni proposition ni décision (cf. ci-dessous).

Ainsi, l’échec de la saison 2014-2015 privant les collaborateurs d’intéressement n’est-il vraiment dû qu’aux mouvements sociaux ? La « complexité » de la relation avec la tutelle semble ne pas tenir compte des efforts promis par le ministère de la Culture pour tenir compte du manque à gagner lié aux attentats – et l’on se demande si cette complexité n’a pas d’autres motifs. De même, la recherche affirmée d’un dialogue social de qualité parait chimérique depuis le triomphe de la CGT lors des dernières élections syndicales, éliminant les syndicats « réformistes » et modifiant l’équilibre subtil des collèges électoraux. La préoccupation évoquée par le Directeur devant la dégradation des conditions de sécurité des représentations remet dans le jardin des syndicats la pierre qu’ils avaient jetée dans celui de la direction lors de l’accident gravissime en plein changement de décor de Werther (narrée peu après avec force détails par Le Canard Enchaîné) et qui avait conduit à la mise à pied du directeur technique, à la grande indignation du corps social de l’Opéra. Enfin, il est étrange que la hausse du prix des places n’apparaisse pas dans les causes identifiées par la direction pour justifier d’une baisse des recettes de billetterie, alors même que les collaborateurs de la Grande Boutique sont systématiquement sollicités par la direction pour acheter des places à prix cassés avant les spectacles et pour participer à l’effort de vente de billets auprès de leur famille et amis.

Il n’en reste pas moins que cette supplique adressée par Stéphane Lissner aux collaborateurs pour les conjurer de ne plus faire grève est fort touchante. Par chance, il reste au Palais Garnier quelques cloisons à abattre pour se refaire la cerise. Mesdames et Messieurs de l’Opéra, à vos massues !

Lettre du Directeur général aux collaborateurs de l’Opéra de Paris.
 
Madame, Monsieur,
En cette fin mai 2016, je crois utile de vous apporter quelques informations sur la situation de notre établissement.
A ce jour, 7 spectacles ont été annulés depuis le début de l’année 2016 du fait de mouvements sociaux dirigés contre le projet de loi travail, soit le nombre le plus élevé depuis plusieurs années et l’Opéra se distingue par rapport aux autres grands établissements publics culturels du pays. La première de Iolanta a été donnée en version de concert, sans Casse-Noisette, et l’avant-première pour les jeunes de Rigoletto a été annulée. Les pertes de billetterie dues aux grèves s’élèvent désormais à environ 1,4 M€, auxquelles il faut ajouter un impact sur les autres ressources propres de l’établissement (bars, programmes, boutiques…), dont le mécénat. D’ores et déjà, notre résultat 2016 est dégradé d’environ 2 M€ et il sera impossible de rattraper cet impact budgétaire.
Les courriers de spectateurs mécontents arrivent de plus en nombreux à l’Opéra. Les grèves ont aussi un impact sur les spectacles en cours pour lesquels le public hésite à acheter des billets ; elles ont des conséquences sur la saison prochaine alors que nous sommes en pleine campagne d’abonnement : de très nombreux spectateurs indiquent ne pas vouloir se réabonner, du fait de la multiplication des grèves depuis quelques mois.
Je suis aussi déçu et préoccupé de voir la préparation de certains spectacles (Der Rosenkavalier, Lear, La Traviata) mise en danger. Lorsqu’une pré-générale est annulée, ou lorsque, en particulier pour des œuvres complexes, le délai entre deux représentations peut devenir très long du fait de l’annulation d’une soirée, les mouvements sociaux ont un impact très négatif sur les artistes et sur tous ceux qui rendent nos spectacles possibles. Je m’interroge aussi sur la sécurité, lorsque les équipes ne disposent pas de tout le temps de préparation nécessaire.
Enfin, je me dois de vous dire que la fragilisation de l’équilibre économique de notre établissement en 2016 aura des conséquences sur notre capacité à investir au cours des prochaines années. De nombreux projets touchant la modernisation de nos théâtres et l’amélioration de la sécurité pourraient être rendus impossibles.
Pour tous ces motifs, la relation de l’établissement avec les ministères de tutelles est rendue plus complexe par la situation actuelle. C’est d’autant plus regrettable que la qualité de nos spectacles depuis le début de la saison a été unanimement saluée.
Je sais que de nombreux salariés de l’Opéra continuent à s’engager sans compter pour l’Opéra Je veux les en remercier ici très chaleureusement.
Le droit de grève est un droit constitutionnel. C’est aussi pour cela que la direction a toujours maintenu le dialogue avec les organisations syndicales et qu’elle est prête à rechercher d’autres modes d’expression des salariés que la fermeture du théâtre.
Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, en l’expression de mes meilleurs sentiments.
 
Stéphane LISSNER

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© AFP - Bertrand Guay

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