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Chausson le littéraire

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CD
28 avril 2020
L’œil au ciel et l’oreille aux aguets

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Ernest Chausson

Chanson perpétuelle Op. 37 (1898)

La Tempête Op. 18* (1888)

Concert Op. 21 (1891)

Eléonore Pancrazi, mezzo-soprano

Louise Pingeot, soprano

Pablo Schatzman, violon

Jean-Michel Dayez, piano

Ensemble Musica Nigella

Takénori Némoto, direction musicale & reconstitution

CD Klarthe – 59’28 (K102)

« Fou des vers, tu t’en vas l’œil au ciel, en rêvant ». Derrière cet alexandrin, extrait des Chansons joyeuses de Maurice Bouchor, faut-il reconnaître Ernest Chausson ? Le poème, publié en 1874, est dédié au compositeur que l’écrivain venait de rencontrer. De leur amitié naîtront plusieurs partitions dont le célèbre Poème de l’amour et la mer et La Tempête, musique de scène destinée au Petit Théâtre des marionnettes de la galerie Vivienne à Paris. Le 5 novembre 1888, un rendez-vous musical où – parait-il – le Tout-Paris de la littérature et des arts se bousculait, donnait à entendre les douze numéros de la partition, dont cinq seulement furent publiés.

Les chansons d’Ariel étaient-elles interprétées par une soprano ou un ténor, comme le proposait l’enregistrement intégral réalisé en 1995 par l’Ensemble Orchestral de Paris pour EMI ? Laurence Dale prêtait alors sa voix à l’Esprit de l’air. Les anges n’ont pas de sexe, c’est bien connu. Elève de l’Ecole Normale de Musique de Paris et du Conservatoire Hector Berlioz, Louise Pingeot offre de l’elfe shakespearien un portrait plus incarné en une diction tout aussi irréprochable, ni plus, ni moins abouti – l’écriture n’exige pas de la voix des prouesses de virtuosité ou d’extrême – simplement autre, avec pour atout le timbre taillé dans un cristal d’une eau pure, dépourvu de cette immatérialité et agressivité – hyperchlorhydrie diraient les médecins – propres à certaines sopranos coloratures.

Eleonore Pancrazi la rejoint le temps du court duo de Junon et Cérès où, avec la complicité de la flûte, les deux voix s’étreignent sur des arpèges de harpe. Le rôle de la mezzo-soprano se réduirait à cette simple figuration si en début de programme, la Chanson Perpétuelle, dernière œuvre achevée d’un compositeur décédée trop tôt (à l’âge de 44 ans, d’un stupide accident de bicyclette), ne lui procurait l’occasion de légitimer les nombreux prix qui couronnent sa jeune carrière, la révélation Artiste Lyrique aux Victoires de la musique classique en 2019 n’étant que l’arbre omniprésent d’une forêt de récompenses. Comment renouveler le propos d’une page trop souvent enregistrée ? Par la jeunesse perceptible d’une voix dont les teintes rougeâtres trahissent les premières écorchures, en accord avec les vers, non de Maurice Bouchor cette fois mais de Charles Cros, qui racontent la douleur de l’abandon. Et l’on sent couler derrière la ligne imperturbable d’un chant conduit avec sobriété, des larmes de sang.

En un jeu de piste cher aux musicologues, le chef-fondateur de l’ensemble Musica Nigella, Takénori Némoto a acquis la conviction, traces de correction sur le manuscrit à l’appui, que la musique de La Tempête fut initialement composée pour un ensemble de six instruments – flûte, violon, alto, violoncelle, harpe et célesta – et non plusieurs années après la version symphonique, comme l’affirmait la théorie officielle. S’il lui a fallu, pour étayer sa thèse, compléter certains passages manquants, nous laissons aux exégètes de Chausson le soin de valider ou non cette approche dont le premier mérite est d’exacerber les accords troublants d’une musique dont la science de l’harmonie ne s’exerce jamais au détriment de la mélodie. Que les partisans du wagnérisme, dont le compositeur du Roi Arthus fut le fer de lance, se rassurent : les Walkyries bourdonnent dans l’Air de danse avant qu’épuisée de plaisir, la flûte ne suspende l’agitation de leur vol sur trois points de suspension.  

« Chausson le littéraire » titre l’album ce qui ne manquerait pas de surprendre au sein d’un programme essentiellement instrumental si l’on ne savait que souvent l’inspiration du musicien fut guidée par ses lectures. Fut-ce le cas du Concert pour piano, violon et quatuor à cordes en ré majeur que le critique musical Pierre Lalo, fils d’Edouard, considérait comme « l’une des œuvres les plus considérable et les plus intéressante qu’on ait en ces dernières années écrite pour la musique de chambre » ? En un épanchement intarissable, l’ensemble Musica Nigella choisit d’en surligner le lyrisme, ce qui n’est pas pour déplaire à l’amateur d’opéra.

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