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LALO, Le Roi d’Ys

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CD
9 mai 2025
Le Roi d’Ys couronné

Note ForumOpera.com

5

Infos sur l’œuvre

Le Roi d’Ys, légende bretonne en trois actes et cinq tableaux d’Édouard Lalo sur un livret d’Édouard Blau, créé le 7 mai 1888 au Théâtre lyrique (Paris)

Détails

Rozenn
Judith van Wanroij

Margared
Kate Aldrich

Mylio
Cyrille Dubois

Karnac
Jérôme Boutillier

Le Roi
Nicolas Courjal

Jahel / Saint Corentin
Christian Helmer

 

 

Orchestre national philharmonique de Hongrie

Chœur national de Hongrie

Direction musicale
György Vashegyi

 

Enregistré du 9 au 11 janvier 2024 au Béla Bartok National Concert Hall du Müpa Budapest (Hongrie)

Livre-disque – Palazzetto Bru Zane

Sortie le 9 mai 2025

Inspiré de la légende bretonne de la ville engloutie d’Ys, Le Roi d’Ys, principale œuvre lyrique du français Édouard Lalo fait partie de ces opéras dont le mélomane a connaissance sans pour autant avoir eu l’occasion de les voir dans leur entièreté. Bien que l’œuvre soit rarement à l’affiche, l’air de ténor « Puisqu’on ne peut fléchir » reste régulièrement donné, Jonas Kaufmann s’offrait encore en 2017 le luxe inattendu de le graver sur son album d’opéra français, et l’air de mezzo « De tous côtés j’aperçois dans la plaine » n’a également pas tout à fait sombré dans l’oubli. Partition inspirée, avec de belles pages chorales, tentative intéressante de synthèse d’opéra français et d’influences wagnériennes, Le Roi d’Ys méritait bien un enregistrement chez Palazzetto Bru Zane, label dont on ne saluera jamais assez les services rendus au répertoire français.

Plus que l’histoire du souverain de la cité bretonne, Le Roi d’Ys est celle de ses deux filles, Rozenn, soprano angélique, et Margared, mezzo rebelle. Cette dernière est fiancée au prince Karnac, guerrier redoutable dont le roi s’assure ainsi de l’amitié, mais toutes deux sont éprises du preux chevalier Mylio. Passons les détails, compliqués, de quelques batailles et fêtes traditionnelles. Margared va d’abord attirer les foudres de Karnac sur Ys, en refusant de l’épouser. Puis, comprenant que Mylio lui préfère sa sœur, elle s’allie à Karnac pour ouvrir les écluses de la cité, provoquant ainsi son inondation.  Karnac est tué par Mylio et Margared se jette à la mer, rachetant sa faute par son sacrifice et arrêtant in extremis la submersion complète d’Ys.

Pour un tel récit, il faut des forces orchestrales et chorales capables de planter le décor et d’animer le drame, ce dont le Chœur et l’Orchestre national philarmonique de Hongrie s’acquittent merveilleusement. Si la direction de György Vashegyi nous a paru un peu placide à l’acte I, où il faut reconnaître qu’il ne se passe encore que peu de chose par comparaison avec les deux actes suivants, elle gagne en nervosité et en théâtre par la suite. Le troisième acte, en particulier, est saisissant, avec un très beau contraste entre la tendresse de l’air de Mylio puis du trio du roi et ses filles et le dramatisme emporté de l’inondation de la cité.

La distribution vocale est d’une grande homogénéité, sans aucun maillon faible. Christian Helmer met un beau baryton au service d’un Saint Corentin hiératique à souhait. Karnac trouve en Jérôme Boutillier un interprète à la voix saine et sûre, à la diction impeccable, capable de tempêter avec autant de menace que nécessaire dans ses deux scènes avec Margared. Dommage que le rôle soit en fait assez peu valorisant, sans aucun air ni moment un peu plus apaisé qui lui permettent de développer d’autres qualités que déclamation et volume. Dans le rôle du Roi d’Ys, Nicolas Courjal, basse dont on ne signale plus l’excellence, peut quant à lui, dans le trio avec ses filles, développer de belles nuances, une ligne de chant douce et touchante qui complètent de manière bienvenue des récitatifs plus marmoréens et impérieux. Pierre angulaire de ce beau quatuor masculin, Cyrille Dubois prête son ténor souple au timbre un peu pincé au chevalier Mylio. Sans aucune surprise, l’air « Puisqu’on ne peut fléchir » lui convient si bien qu’on le croirait écrit pour lui. Ces quelques pages élégantes, espiègles, tout en nuances de piano et pianissimo, couronnées par un contre-la en voix de tête sont parfaitement servies par la voix claire, la diction impeccable et le style légèrement précieux de Dubois. De manière un peu moins attendue, les passages plus guerriers du rôle lui vont tout aussi bien. Son sens du mot fait merveille, en particulier dans le final du premier tableau de l’acte III. Du côté féminin, Judith van Wanroij met un soprano un peu nasal mais élégant et gagnant en fruité vers le haut de la tessiture au service de Rozenn. Très à son avantage dans le duo d’amour avec Mylio au dernier acte, elle fait montre d’un joli legato et d’aigus lumineux. Le tempérament fougueux de Kate Aldrich, enfin, donne toute son aura tragique à Margared. Si l’on pourrait souhaiter davantage de dégradé de couleurs, notamment dans sa scène de l’acte II, son sens du théâtre balaie toute réserve. « L’enfer écoute » dit Maragred à un Karnac désespéré de ne trouver de soutien ni du ciel ni du diable. Et en effet, quand Kate Aldrich chante, avec une telle maîtrise sur toute la longueur de la tessiture, d’aigus plein d’aplomb jusqu’à des graves poitrinés d’un beau métal sombre, il y a bien quelque chose de terrifiant.

Servi par une si belle distribution et des forces collectives si convaincantes, ce Roi d’Ys a tout pour séduire et captiver l’auditeur. À l’heure où l’Opéra national de Paris a dévoilé une saison 2025-26 si timide en ce qui concerne l’opéra français, cette intégrale nous rappelle tristement, mais magistralement, tout ce que nous manquons sur nos scènes !

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bru zane roi d'ys

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Le Roi d’Ys, légende bretonne en trois actes et cinq tableaux d’Édouard Lalo sur un livret d’Édouard Blau, créé le 7 mai 1888 au Théâtre lyrique (Paris)

Détails

Rozenn
Judith van Wanroij

Margared
Kate Aldrich

Mylio
Cyrille Dubois

Karnac
Jérôme Boutillier

Le Roi
Nicolas Courjal

Jahel / Saint Corentin
Christian Helmer

 

 

Orchestre national philharmonique de Hongrie

Chœur national de Hongrie

Direction musicale
György Vashegyi

 

Enregistré du 9 au 11 janvier 2024 au Béla Bartok National Concert Hall du Müpa Budapest (Hongrie)

Livre-disque – Palazzetto Bru Zane

Sortie le 9 mai 2025

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