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Passacalle de la Follie

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CD
21 février 2023
Philippe Jaroussky et Christina Pluhar : 20 ans déjà !

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

1. Pierre Guédron / arr. C. Pluhar
Aux plaisirs, aux délices bergères

2. Antoine Boësset / arr. C. Pluhar
A la fin de cette bergère

3. Estienne Moulinié
Non speri pietà

4. Michel Lambert
Vos mépris chaque jour

5. Robert De Visée, Marin Marais, improvisation / arr. C. Pluhar
Improvisation sur les Folies d’Espagne

6. Henry de Bailly / arr. C. Pluhar
Yo soy la locura. Passacalle (La Follie)

7. Estienne Mouliné
Paisible et ténébreuse nuit

8. Antoine Boësset / arr. C. Pluhar
Nos esprits libres et contents

9. Estienne Moulinié / arr. C. Pluhar
Orilla del claro Tajo

10. Michel Lambert
Ma bergère est tendre et fidèle

11. Robert De Visée
Passacaille en rémineur pour guitare

12. Gabriel Bataille
El baxel està en la playa

13. Robert De Visée
Chaconne en sol mineur

14. Estienne Moulinié / arr. C. Pluhar
Concert des différents oiseaux

15. Louis de Caix d’Hervelois
Plainte

16. Estienne Moulinié
Enfin la Beauté

Philippe Jaroussky, contre-ténor

L’Arpeggiata

Direction musicale, théorbe et arrangements

Christina Pluhar

1CD Erato Warner Classic 5419722187
Durée : 62’57 »

Sortie le 17 février

Voilà 20 ans que Philippe Jaroussky et Christina Pluhar collaborent, à la scène comme au disque, avec un succès régulièrement salué. Pour célébrer cela, ils ont choisi de nous livrer leur vision d’un répertoire particulièrement raffiné : les airs de cour, un genre vocal qui fit fureur au XVIIe français.

L’art de bien s’entourer

Quand la harpiste, luthiste et théorbiste Christina Pluhar fonde son ensemble, en 2000, Johann Hieronymus Kapsberger est déjà sorti de l’oubli, entre autre grâce au travail de Rolf Lislevand. En choisissant de nommer sa formation L’Arpeggiata, titre d’une Toccata de 1604, elle révèle sa fascination pour ce compositeur allemand, né à Venise, qui compose une musique plus folle et plus libre que celle laissée par la plupart de ses confrères italiens du début du XVIIe siècle. Avec un flair indéniable, Christina Pluhar s’attache à faire revivre un répertoire savant, souvent à la pointe de la créativité, mais en le reliant à des racines populaires et en l’inscrivant dans une logique d’improvisation. Si son ensemble adopte une configuration à géométrie variable, on y retrouve des constantes et quelques fidèles : les cordes pincées y occupent une place importante, les percussions, plus ou moins exotiques, sont toujours de la partie, du côté des vents elle invite de bons improvisateurs (Gianluigi Trovesi à la clarinette ou, comme ici, Doron Sherwin au cornet). Cette ligne éditoriale confère à l’Arpeggiata une sonorité qui lui est propre et assez rapidement reconnaissable, que le répertoire exploré soit napolitain, sud-américain, signé Haendel, Purcell, Monteverdi ou d’autres encore. Autre constante qui transparaît au fil de la vingtaine d’albums enregistrés par l’Arpeggiata : une prédilection marquée pour les chaconnes, passacailles, basses obstinée, et autres grounds, dont la structure harmonique simple parle directement à tout auditeur. La démarche s’attache plus à donner un maximum de plaisir au public d’aujourd’hui qu’à élaborer une reconstruction purement musicologique.

La séduction des voix

Le flair de Christina Pluhar s’exerce également dans le choix des solistes vocaux dont elle s’entoure. Durant les premières années, le répertoire des tarentelles est exploré avec Marco Beasley et Pino de Vittorio, deux formidables ténors napolitains, qui ont largement contribué au succès de l’ensemble par leur irrésistible exubérance et leur charisme. Par la suite Lucilla Galeazzi a apporté son art populaire, et au gré des répertoires explorés on retrouvera Raquel Andueza, Céline Scheen, Véronique Gens, Nuria Rial, Jakub Józef Orliński, et … Philippe Jaroussky ! Cette liste non exhaustive éclaire le goût certain de Christina Pluhar pour de belles voix, baroques ou populaires, qui accrochent bien l’oreille, enjôleuses et expressives.

L’air de cour

Ce genre tellement français illustre au mieux le passage de la Renaissance vers le baroque dans l’Hexagone. Antoine Boësset (1587-1643) laisse 9 livres d’airs de cours à 4 et 5 parties, qui seront également publiés pour voix seule avec accompagnement en tablature pour le luth, qui reproduit la polyphonie. Il suit en cela la pratique de son beau-père, Pierre Guédron, qui compose lui aussi abondamment dans les deux formes, et celle de son contemporain, Etienne Moulinié. Cela montre le succès de la mélodie accompagnée du seul luth, qui met mieux en évidence le chant soliste et le texte qu’il porte. Cette forme de monodie permet en outre au chant de développer de riches guirlandes d’ornements, trilles et appoggiatures, partie essentielles de l’idiome baroque. Comme tout le baroque français du XVIIe siècle, cette musique est marquée d’une ineffable langueur, d’une délicieuse mélancolie qui demande une interprétation raffinée, toute en élégance subtile.

Passacalle de la Follie, le dernier-né

Au fil des 16 plages de l’album, nous découvrons avec plaisir les meilleurs représentants de l’air de cour : Guédron, Boësset, Moulinié, mais également Michel Lambert, Henry de Bailly et Gabriel Bataille. Quatre pièces instrumentales permettent de varier l’écoute et de goûter à l’art de Robert de Visée, Marin Marais ou Louis de Caix d’Hervelois, mais on a entendu des Folies d’Espagne (par exemple) plus enlevées. L’intérêt de l’album réside plutôt dans le répertoire vocal brillamment défendu par Philippe Jaroussky.

La première plage, « Aux plaisirs, aux délices bergères » , sonne étrangement comme l’une de ses tarentelles dont l’Arpeggiata nous a gratifié à de nombreuses reprises, n’étaient-ce les paroles françaises. Puis avec « Vos mépris chaque jour », on a l’impression d’enfin toucher à l’essence de l’air de cour, cette suave mélancolie dans laquelle se complait avec langueur le soliste. Le quatrain mis ici en musique par Michel Lambert décrit parfaitement cet état d’âme :

Vos mépris chaque jour me causent mille alarmes, 
Mais je chéris mon sort, bien qu’il soit rigoureux : 
Hélas ! si dans mes maux je trouve tant de charmes, 
Je mourrais de plaisir si j’étais plus heureux. 

O retrouve plus loin cette humeur de voluptueuse morosité : « Paisible et ténébreuse nuit » (Moulinié), « Nos esprits libres et contents » (Boësset), « Ma bergère est tendre et fidèle » (Lambert) ou encore le superbe « Enfin la beauté que j’adore » (Moulinié). La voix de Jaroussky y excelle, par sa musicalité et son sens de l’ornementation. Est-ce le goût de « déjà entendu » ? Les arrangements que signe Christina Pluhar nous convainquent moins dans ce répertoire. A titre d’exemple, comparez la passacaille « Yo soy la locura » (Henry de Bailly) avec les versions qu’en ont donné Montserrat Figueiras avec Jordi Savall ou Claire Lefilliâtre et le Poème Harmonique. Dans le premier cas, on a le sentiment de se trouver dans une taverne un soir de carnaval, avec les deux autres, on est bouleversé par la mélancolie qui traverse cette charmante pièce, qu’on a aucun mal à imaginer dans un royal salon.

Bref, voici un nouvel opus qui ne manquera pas de combler les fervents de Christina Pluhar et de Philipe Jaroussky, par sa conformité aux attentes, et parce qu’il s’inscrit dans la droite ligne de ce que l’Arpeggiata nous propose depuis une bonne vingtaine d’années.  Pour qui souhaiterait découvrir plus en profondeur ce répertoire magnifique, le Poème Harmonique de Vincent Dumestre l’a remarquablement défendu au travers de plusieurs albums.

Mais l’Arpeggiata est également un ensemble qui s’y entend pour galvaniser un très large public et si vous n’avez jamais assisté à un de leurs concerts ne ratez pas les deux dates qui se profilent avec Philippe Jaroussky. Ils défendront le programme de ce nouvel album le lundi 27 mars à l’Opéra de Montpellier et le mercredi 29 mars au Théâtre des Champs-Élysées, à Paris.  

 

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1. Pierre Guédron / arr. C. Pluhar
Aux plaisirs, aux délices bergères

2. Antoine Boësset / arr. C. Pluhar
A la fin de cette bergère

3. Estienne Moulinié
Non speri pietà

4. Michel Lambert
Vos mépris chaque jour

5. Robert De Visée, Marin Marais, improvisation / arr. C. Pluhar
Improvisation sur les Folies d’Espagne

6. Henry de Bailly / arr. C. Pluhar
Yo soy la locura. Passacalle (La Follie)

7. Estienne Mouliné
Paisible et ténébreuse nuit

8. Antoine Boësset / arr. C. Pluhar
Nos esprits libres et contents

9. Estienne Moulinié / arr. C. Pluhar
Orilla del claro Tajo

10. Michel Lambert
Ma bergère est tendre et fidèle

11. Robert De Visée
Passacaille en rémineur pour guitare

12. Gabriel Bataille
El baxel està en la playa

13. Robert De Visée
Chaconne en sol mineur

14. Estienne Moulinié / arr. C. Pluhar
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Plainte

16. Estienne Moulinié
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