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Wozzeck

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DVD
19 octobre 2016
Théâtre de Guignol

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra en 3 actes (15 scènes), livret du compositeur

d’après le drame Woyzeck de Georg Büchner

Création au Staatsoper Unter den Linden de Berlin le 14 décembre 1925

Détails

Mise en scène

Andreas Homoki

Décors et costumes

Michael Levine

Lumières

Franck Evin

Dramaturgie

Kathrin Brunner

Wozzeck

Christian Gerhaher

Tambour-major

Brandon Jovanovich

Andrès

Mauro Peter

Le Capitaine

Wolfgang Ablinger-Sperrhacke

Le Docteur

Lars Woldt

Marie

Gun-Brit Barkmin

Margret

Irène Friedli

L’enfant de Marie

Alessandro Reinhart

Premier Compagnon

Pavel Daniluk

Deuxième Compagnon

Cheyne Davidson

Le fou

Martin Zysset

Chœur de l’Opéra de Zurich

Chef de chœur

Jürg Hämmerli

Philharmonia Zürich

Direction musicale

Fabio Luisi

Enregistré en septembre 2015 à l’Opéra de Zürich

1 DVD Accentus music – 1h40, sous-titres en français, anglais et allemand

En raison de la demande expresse de Berg du « plus grand réalisme possible » dans la mise en scène de son premier opéra Wozzeck, rarement une œuvre du siècle dernier aura si longtemps assigné une scénographie aussi constante dans toutes les productions l’ayant abordée. D’interprète en interprète, Wozzeck apparaît en casaque et coiffé d’un béret alors que paysages d’étangs et de casernes se succèdent sans vraiment marquer les mémoires.

Voilà donc tout le challenge des récentes productions que de s’aventurer au-delà du réalisme naturaliste pour dévoiler en toute franchise la pensée et l’émotion déployées dans cet opéra. C’est un pari à chaque fois risqué, allant à l’encontre de la volonté première du compositeur, mais aussi souvent porteur d’une intensité vraie. C’est le cas de l’approche surréaliste d’Andreas Homoki qui déploie l’aspect psychologique de l’œuvre et de son personnage principal dans toute sa nature. Alors que nous l’imaginons assez figée et bien terne en live dans la salle de théâtre de Zurich, cette mise en scène fonctionne à la perfection dans cette réalisation vidéo.  

Tout comme Berg et ses inventions sur un thème, sur une note, sur un rythme, sur un accord de six sons ou sur un Perpetuum mobile (acte III), le cadre de couleur jaune passé de Michael Levine faisant office de décor, évolue pour arriver à une composition répétitive construisant une perspective de plus en plus étourdissante selon l’avancée de la folie du soldat (n’oublions pas l’affection particulière du décorateur de Carsen pour les effets en trompe-l’œil). Les chanteurs, contraints à cet espace clos (mais dont l’équilibre est rétabli par un langage scénique proche de la pantomime et par une parfaite direction d’acteurs), apparaissent comme dans un théâtre de marionnettes et disparaissent comme à Guignol, rendant la présence de chacun bien absurde et grotesque, l’ironie et la dimension critique ne s’attaquant pas ici aux archétypes des personnages d’opéra, mais bien directement aux figures sociales qu’ils représentent. Wozzeck, pauvre soldat tout en bas de l’échelle, rejeté par une société dont les codes sont bien délimités, fait l’objet d’une exploitation humiliante de la part de sa hiérarchie comme de l’establishment. L’infidélité manifeste de sa compagne illégitime lui fera commettre l’irréparable (le meurtre de Marie) tout en perdant pied mentalement et littéralement (il se noie dans l’étang).

C’est fort d’une grande humilité que Christian Gerhaher réussit cette prise de rôle pourtant difficile. En effet, Berg utilise plusieurs styles de déclamation et de chant qui rendent la vocalité vivante et contrastée mais d’une grande complexité pour un chanteur lyrique ayant peu abordé cette musique. Le style vocal du personnage passe du murmure au cri, de l’acceptation mécanique (« Jawohl, Herr Hauptmann ! ») à une folie meurtrière empreinte d’exaltation. Peu présent sur les scènes d’opéra, bien plus enclin aux lieders et à Mozart, le baryton émeut par des inflexions de voix subtiles à souhait, des couleurs sonores variées lui permettant de dénoter amplement face aux autres protagonistes abordés comme des pantins sous l’emprise des codes sociaux dont chacun s’oblige à respecter scrupuleusement et mettant ainsi en exergue la folie intérieure dont est atteint le militaire. Traitement judicieux pour certains, bien moins pour l’héroïne libertine…

Alors que Gun-Brit Barkmin dispose d’une voix ample et sonore dotée d’un registre grave poitriné comme de notes aiguës très affirmées (voire stridentes), c’est avec froideur qu’elle aborde le personnage de Marie (autant son rôle de mère que d’amante), limitant sous ses traits le caractère de la jeune femme plus « putain » que mère, ainsi que notre empathie envers elle. Nous la voyons disparaître, le couteau niché au sein de sa poitrine, sans une once d’émotion ni de regret.

La prestation de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (le Capitaine) et de Lars Woldt (le Docteur) est plus cohérente et beaucoup plus convaincante. Les magnifiques costumes de Michael Levine subliment le côté grotesque de ces personnages, l’un comme l’autre fourbes autant qu’hypocrites, tout comme la belle allure de brigadier d’opérette du tambour-major, magnifiquement interprété par Brandon Jovanovich dont la prestance, la fourberie et la beauté de la voix nous comblent. Mauro Peter, ténor lyrique très mozartien dans le rôle d’Andrès, Irène Friedli en Margret dont le triste Volkslied est brillamment exécuté, et les deux compagnons complètent cette brillante distribution, Pavel Daniluk déployant un maximum d’effets vocaux en Sprechstimme, demi-chanté, fausset ou encore portamento entre l’emphase et l’ivresse.

Il nous semble hâtif de juger le décor de cette production trop minimaliste, alors que la direction musicale fougueuse et extravertie de Fabio Luisi démontre au contraire par le figuralisme de son orchestre, que celui-ci octroie à la musique un déploiement flamboyant ; la captation vidéo nous apportant une vraie valeur ajoutée lorsqu’elle nous entraîne dans la fosse au moment des intermèdes symphoniques encadrant chaque tableau. Les musiciens de la Philharmonia Zürich mettent soigneusement en avant la profusion de timbres de cette musique atonale où les couleurs musicales ont été soigneusement choisies en fonction des situations mais aussi pour créer un coucher de soleil à l’acte I ou un lever de lune rouge sang à la quatrième scène du dernier acte.

Le regard acerbe du metteur en scène atteindra même la maîtrise de l’Opéra de Zürich, les enfants devenant des répliques de chaque personnage principal. Ce sera une petite fille sous une longue perruque rousse identique à celle de Marie qui annoncera la mort de sa mère au fils de Wozzeck. Pour Andreas Homoki, entre sarcasme, violence, luxure et grotesque exacerbée, cet opéra est « un plaidoyer passionné en faveur de la dignité de l’Homme et un appel à l’humanité. »

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Création au Staatsoper Unter den Linden de Berlin le 14 décembre 1925

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Mise en scène

Andreas Homoki

Décors et costumes

Michael Levine

Lumières

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Dramaturgie

Kathrin Brunner

Wozzeck

Christian Gerhaher

Tambour-major

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Mauro Peter

Le Capitaine

Wolfgang Ablinger-Sperrhacke

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