Créé à l’occasion du Carnaval de Mantoue de 1819, Le nozze in villa (Les Noces en ville) est le quatrième opéra de Gaetano Donizetti, après Il Pigmalione, Enrico di Borgogna et Una follia, dont la partition a été perdue.
L’intrigue en est on ne peut plus classique, reprenant les canons de l’opéra-bouffe italien, sans imagination particulière. Petronio, le podestat de la ville, est décidé à faire épouser sa fille Sabina par Trifoglio, le maître d’école, lequel est sceptique car la jeune femme n’a pas été consultée. Sabina est amoureuse de Claudio, mais celui-ci reste invisible. Tandis que la jeune fille contemple rêveusement son portrait, elle se fait surprendre par sa grand-mère Anastasia. Pour cacher ses sentiments, elle lui explique qu’il s’agit là d’un portrait du roi. Introduit par Petronio, Trifoglio tente une cours maladroite. On annonce au podestat l’arrivée prochaine d’un homme de haut rang : il s’agit bien sûr de Claudio. La grand-mère manque de s’évanouir en reconnaissant celui qu’elle croit être le roi du portrait mais, après quelques minutes de confusion, Claudio dissipe le malentendu. A l’acte II, Petronio, furieux d’avoir reçu Claudio comme un souverain, persiste dans son projet de mariage. Claudio et Trifoglio se disputent l’amour de la jeune fille, mais le maître d‘école est sûr d’avoir vaincu son cœur et les rivaux se séparent. La nuit tombée, Sabina et Claudio échangent leurs promesses amoureuses, bientôt rejoints par Trifoglio qui donne la sérénade. Tout ce bruit attire le voisinage, les amants sont découverts et Trifoglio exige des explications. Ses projets amoureux ont été quelque peu refroidis, mais il s’intéresse quand même à la dot que le beau-père serait prêt à donner. Quand il découvre qu’elle se compose de 58 perruques et d’une douzaine de paires de lunettes, il préfère renoncer au mariage. N’exigeant aucune dot, Claudio achève de conquérir l’estime de son futur beau-père.
Le jeune Donizetti est encore loin de la maturité de son style. La musique est plaisante mais sans mélodies particulièrement significatives. On songe inévitablement aux compositions de Rossini (en particulier à L’Italiana in Algieri), avec parfois des citations mozartiennes (« Fuor del mar »). Seul le trio Sabrina, Petronio et Claudio de l’acte II sort un peu de la routine. Le manuscrit autographe ayant été perdu, la présente édition a été réalisée à partir d’une copie conservée à la Bibliothèque nationale de France à Paris auquel il manquait le quintette de l’acte II, « Aura gentil, che mormori ». Pour cette édition, une composition a été commandée à Elio et Rocco Tanica, aidés d’Enrico Melozzi, qui ont écrit une musique dans le style donizettien (ça se discute) sur le texte du livret dont la musique était perdue, seul passage vraiment original et tout à fait intéressant de cette version.
La distribution est homogène à défaut d’être remarquable. Omar Montanari bougonne un Don Petronio un peu nasal. Un peu plus trompettant, Fabio Capitanucci a davantage de jeunesse en Trifoglio. Trop vert, Giorgio Misseri oscille entre un registre aigu constamment en force et un medium trop discret. En Sabina, le mezzo Gaia Petrone est la bonne surprise de la soirée, avec un timbre moiré et une bonne technique vocale, on sent la graine d’une future Rosina pour les grandes scènes. Sous la baguette plus scrupuleuse qu’imaginative de Stefano Montanari, l’orchestre Gli Originali, sur instruments anciens, porte un peu trop bien son nom. L’ensemble gagne toutefois en cohésion au fil de cette représentation, a priori enregistrée sur le vif pendant le confinement (il existe également un DVD / Blu Ray). Si cette œuvre reste davantage destinée aux collectionneurs, curieux ou amoureux de Donizetti, son édition a le grand mérite d’exister grâce à la persévérance du Festival Donizetti de Bergame et nous permet de découvrir un Donizetti qui cherche encore son style…