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DEBUSSY, Pelléas et Mélisande — Paris (Opéra Comique)

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Spectacle
14 juin 2010
D’un intimisme cohérent

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Drame lyrique en cinq actes
Livret du compositeur d’après la pièce de Maurice Maeterlinck.
Créé à l’Opéra Comique le 30 avril 1902

Détails

Mise en scène et scénographie, Stéphane Braunschweig
Costumes, Thibault Vancraenenbroeck
Lumières, Marion Hewlett
Dramaturge, Anne-Françoise Benhamou
Pelléas, Phillip Addis
Mélisande, Karen Vourc’h
Golaud, Marc Barrard
Arkel, Markus Hollop
Geneviève, Nathalie Stutzmann
Yniold, Dima Bawab
Un médecin, Luc Bertin-Hugault
Un berger, Pierrick Boisseau
Chœur Accentus
Chef de chœur, Pieter Jelle de Boer
Orchestre Révolutionnaire et Romantique
Direction musicale, Sir John Eliot Gardiner
Opéra Comique, le 14 juin 2010

John Eliot Gardiner explique dans le programme qu’il a voulu pour ces représentations de Pelléas et Mélisande à l’Opéra Comique, la version la plus complète possible ; il rétablit ainsi les coupures auxquelles Debussy avait dû se résoudre dès les répétitions pour satisfaire à la censure et aux capacités vocales des interprètes (notamment la voix d’enfant du petit Yniold). C’est cette même version qu’il avait déjà proposée à Lyon en 1986, avec une très belle distribution1, à ceci près qu’il a opté cette fois pour les interludes musicaux longs réécrits par le compositeur afin de permettre les changements de décors lors des tombées de rideau. Résultat : une version ultra-complète et ultra longue qui, ajoutée au report d’une demi-heure dû à la grève de salariés de l’opéra, fait finir le spectacle aux environs de minuit, entraînant la fuite bruyante et précipitée de nombre de spectateurs pendant les saluts.

 

Même si Pelléas et Mélisande n’est pas une rareté absolue salle Favart (il s’agit ici de la 448e représentation), c’est un réel plaisir d’entendre l’œuvre dans son lieu de création, sur une scène à la mesure de cet ouvrage intimiste. Le drame lyrique peut en effet perdre de son charme évanescent dans des salles de plus grande dimension.

 

D’intimisme il est d’ailleurs beaucoup question dans l’interprétation proposée par John Eliot Gardiner à la tête d’un orchestre Révolutionnaire et Romantique aux sonorités parfois un peu vertes, surtout les bois  : direction très analytique et « dégraissée », découpant les plans sonores, sans pour autant sacrifier l’unité mélodique2. Pas de grands noms au sein de la distribution et au final peu d’individualités fortes, mais une grande homogénéité et pour tous une qualité essentielle : une diction excellente qui rend inutile tout sous-titrage, permettant ainsi de pleinement goûter le texte de Maeterlinck.

 

On applaudira également la crédibilité physique des chanteurs, notamment la Mélisande frêle et fluide, sylphide apeurée puis jeune fille prostrée, de Karen Vourc’h. La voix est au diapason, éthérée,le timbre liquide, un peu absente La projection est parfois limitée, mais ce n’est pas réellement un problème dans cette salle de taille modeste. Le Pelléas de Phillip Addis, d’allure juvénile et dégingandée, est moins séduisant vocalement, la faute à un certain manque de couleur. De plus, la tessiture très tendue du rôle semble gêner le baryton, dont les aigus sont systématiquement en force et parfois détimbrés.

Son demi-frère, Golaud, impressionne davantage : le sombre baryton de Marc Barrard sied parfaitement à l’homme torturé ; la puissance est au rendez-vous, mais aussi la nuance. C’est d’ailleurs ce surcroît de subtilité que l’on pourrait lui reprocher dans les scènes de fureur et de jalousie aveugle où le chanteur, inouï de violence physique, fait presque preuve de trop de correction vocale.

Et que dire des courtes interventions de Nathalie Stutzmann, voix homogène jusque dans l’extrême grave sinon qu’avec une économie de moyens et d’expression rares, elle rayonne d’humanité dans la lecture de la lettre. L’Arkel de Markus Hollop a également pour lui une belle présence, mais, sur le plan vocal, il est malheureusement disqualifié par une intonation bien douteuse. Enfin, le fait d’avoir confié Yniold à une jeune chanteuse (Dima Bawab) déforme le caractère du personnage : on gagne en puissance, en rondeur3, voire en justesse, ce que l’on perd en pureté et en innocence.

 

Scéniquement, l’on craignait le pire avec une première scène, la rencontre de Golaud et Mélisande dans la forêt, devant le rideau. Mais par la suite le dispositif scénique s’avère varié, avec de lourdes et oppressantes persiennes enfermant la scène, ne laissant que rarement passer un rayon de soleil. On apprécie également le fin travail sur le jeu d’acteurs. Malheureusement le metteur en scène semble sans cesse hésiter entre symbolisme et approche littérale. Ainsi la scène dans laquelle Golaud demande à son enfant d’espionner Mélisande suit parfaitement le livret (Golaud hisse Yniold sur ses épaules pour que l’enfant atteigne la fenêtre de la tour), tandis que, pour  la scène des cheveux, la tour a totalement disparu au profit d’un simple tête à tête entre Mélisande et Pelléas, qui manque par ailleurs un peu d’érotisme4. Un choix plus tranché aurait peut-être mieux servi la force du livret.

 

Plus que par des fulgurances individuelles ce Pelléas version longue séduit donc par sa belle homogénéité scénique, instrumentale et vocale.

 

 

1 Alliot-Lugaz, Le Roux, Van Dam, Soyer, Taillon.

2 Les échos de personnes placées plus de côté semblent cependant moins flatteurs quant à la cohésion du rendu orchestral.

3 John Eliot Gardiner en profite pour réintroduire la scène de cauchemar de l’enfant avant le rendez-vous fatal de Pelléas et Mélisande à l’acte 4.

4 Mais peut-être est-ce voulu, ce ne sont en somme que des enfants…

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Drame lyrique en cinq actes
Livret du compositeur d’après la pièce de Maurice Maeterlinck.
Créé à l’Opéra Comique le 30 avril 1902

Détails

Mise en scène et scénographie, Stéphane Braunschweig
Costumes, Thibault Vancraenenbroeck
Lumières, Marion Hewlett
Dramaturge, Anne-Françoise Benhamou
Pelléas, Phillip Addis
Mélisande, Karen Vourc’h
Golaud, Marc Barrard
Arkel, Markus Hollop
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Opéra Comique, le 14 juin 2010

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