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DEBUSSY

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CD
20 septembre 2023
Splendeur, subtilité et émotion debussystes

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

 

 

Détails

Claude Debussy

C’est l’extase (10 mélodies sur des poèmes de Verlaine, orchestrées par Robin Holloway – 2012)

la Mer

 

Vannina Santoni, soprano (*)

Orchestre Philharmonique de Radio-France

Direction musicale

Mikko Franck

 

1 CD Alpha Classics, Alpha 981, de 52′ 09, enregistré en septembre 2022 à l’Auditorium de Radio-France (Paris)

Après le Martyre de Saint-Sébastien, André Caplet avait été le premier, semble-t-il, à orchestrer des mélodies de son ami Debussy (1). La liste serait longue des transcriptions réalisées ensuite, signées Ravel, Büsser, Stokowski, Ansermet et combien d’autres. Robin Holloway, élève d’Alexander Goehr, s’est familiarisé très tôt à l’œuvre de Debussy (2). Son œuvre abondante témoigne de cette admiration, à la fois par l’influence exercée sur son écriture, mais aussi par ses transcriptions (3). Ainsi, dès 2002, c’est En blanc et noir qu’il orchestre, transcrivant ensuite pour soprano et orchestre dix mélodies de Debussy sur des poèmes de Verlaine, regroupées sous le titre « C’est l’extase » (2012). Depuis, en 2021, entrent au catalogue « Four Verlaine Songs », avec prologue et épilogue, pour soprano et quatuor avec piano.

De Mozart – qu’elle retrouvera à Zürich, puis à Garnier (Fiordiligi) – à la création contemporaine, Vannina Santoni s’est imposée sur nos scènes lyriques. Sauf erreur, pour la première fois au disque, elle aborde la mélodie orchestrée. C’est le recueil de 10 poèmes de Verlaine (« C’est l’extase ») qu’elle a retenu avec Mikko Franck pour cet enregistrement. Aux Ariettes oubliées, Robin Holloway, le compositeur-arrangeur, a ajouté les trois Mélodies de Verlaine, et Mandoline, qu’il conclut par un épilogue orchestral de sa main (4). L’ordre a été parfois modifié pour renforcer la cohérence du propos. Quelques surprenantes transitions orchestrales permettent certains enchaînements, sans jurer avec les introductions originales. L’épilogue, à lui seul, mériterait l’acquisition du CD : dans le droit fil de l’écriture debussyste, mâtinée de Koechlin et Dukas, ce con molto agitato est un régal constant. Il n’est pas de pièce qui laisse indifférent. Ainsi croit-on redécouvrir le jubilatoire Chevaux de bois, dans cette version, qu’aurait pu signer Poulenc. Il en va de même de Mandoline, qui suit. De la caressante Extase langoureuse à La mer est plus belle, cette commande de Michael Tilson Thomas méritait une diffusion, que le disque autorise.

La présence – essentielle – de l’orchestre implique-t-elle que les nuances, de façon constante, soient élevées d’une gradation au moins ? Parfois on attend davantage de retenue, de réserve, ainsi dans la mélodie qui ouvre le cycle. Même si l’exercice n’est pas aisé, il faut oublier les mélodies dans leur version originale pour écouter et apprécier pleinement cet enregistrement, passer du salon à la salle de concert, avec une dimension vocale et dramatique radicalement modifiée. Pour autant, jamais l’emphase opératique ne guette, même si les accents de la ligne vocale peuvent y inviter. La séduction est là, l’orchestration de Robin Holloway est splendide, très debussyste, somptueuse. La voix ne l’est pas moins, dans son émission, son soutien, sa souplesse, ses couleurs comme son intelligibilité. La grande soprano lyrique y déploie toutes ses qualités.

Une nouvelle Mer… « A quoi bon ? » serait-on tenté de penser, tant les innombrables versions nous en ont révélé les moindres secrets. Cet accueil désabusé n’a pas lieu d’être, et ce, dès les premières mesures. Cette mer est saline, qui sent le varech, dont les embruns nous éclaboussent, elle moutonne, déferle, écume, toujours fluide, vivante, fine comme majestueuse. Mais on est bien au-delà du spectacle, par sa dimension onirique. On se régale autant des senteurs marines, des couleurs, que du mystère. Toujours on est captivé par ce discours renouvelé, qui ménage bien des surprises, dont les transitions sont abouties. Le plus infime détail est perceptible sans compromettre la vision globale ni le souffle.

Mikko Franck connaît son Debussy, tout comme le Philharmonique de Radio France. Sous sa direction, l’orchestre trouve une densité lumineuse rare, fluide et transparente. Les dosages subtils, relevant d’une alchimie complexe, les alliages de couleurs, les mixtures, dès De l’aube à midi sur la mer, permettront à cet enregistrement de se hisser au meilleur niveau. Les cordes sont soyeuses, la petite harmonie agile et colorée, fruitée, la tradition est encore perceptible des bois français. L’ample chant des violoncelles divisés du premier mouvement, sa coda majestueuse sont exemplaires. Les Jeux de vagues, aux motifs scintillants, émiettés, insaisissables, leur tumulte nous fascinent. Le caractère tourmenté, lourd de menaces, la formidable énergie du Dialogue du vent et de la mer, sans oublier le retour du grand thème de la mer aux bois, tout est également réussi.

Un enregistrement à découvrir, pour les orchestrations des poèmes de Verlaine, déjà, mais aussi pour cette Mer, de nouveau renouvelée. Seul tout petit regret, le minutage un peu chiche… n’aurait-on pu joindre quelqu’autre pièce ?

(1) Il poursuivra après la disparition de Debussy avec La Boîte à joujouxJet d'eauClair de lune, Children’s Corner, Pagodes, après s’être chargé de la réduction pour un ou plusieurs pianos de nombre d’œuvres orchestrales du maître.. 
(2) Sa thèse était intitulée « Debussy and Wagner ».
(3) Chabrier, et Ravel ne sont pas en reste : le Menuet sur le nom de Haydn a été orchestré en 2003, Un grand sommeil noir en 2019. On pourrait ajouter Britten et d’autres.
(4) Pour une intégrale des poèmes de Verlaine qu’illustra Debussy, seuls font défaut les deux recueils des Fêtes galantes, et Pantomime – que Debussy avait retiré du premier recueil, comme Mandoline.

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Claude Debussy

C’est l’extase (10 mélodies sur des poèmes de Verlaine, orchestrées par Robin Holloway – 2012)

la Mer

 

Vannina Santoni, soprano (*)

Orchestre Philharmonique de Radio-France

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Mikko Franck

 

1 CD Alpha Classics, Alpha 981, de 52′ 09, enregistré en septembre 2022 à l’Auditorium de Radio-France (Paris)

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