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MOZART, Idomeneo – Nancy

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Spectacle
1 octobre 2023
Flair du directeur, talent du réalisateur

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Dramma per musica en trois actes (Munich 29 janvier 1781)

Musique de Wolfgang Amadeus Mozart – K.366

Livret de Giambattista Varesco

D’après Idoménée, livret d’Antoine Danchet (1712)

Nouvelle production Opéra de Lorraine en version semi-scénique

Détails

Mise en scène
Lorenzo Ponte

Costumes
Giulia Rossena

Lumière
Emanuele Agliati

Scénographie
Alice Benazzi

 

Idomeneo
Toby Spence

Idamante
Héloïse Mas

Ilia
Siobhan Stagg

Elettra
Amanda Woodbury

Arbace
Léo Vermot-Desroches

Gran Sacerdote
Wook Kang

Voce di Nettuno
Louis Morvan

Crétoises et Troyens
Inna Jeskova, Séverine Maquaire, Yongwoo Jung, Jinhyuck Kim

Méda
Rosabel Huguet

Orchestre et chœur de l’Opéra national de Lorrain

Direction musicale
Jakob Lehmann

 

Nancy, Opéra national de Lorraine, vendredi 29 septembre 2023, 20h

A Nancy, on a un budget contraint mais on a des idées. Ou bien du flair, comme Matthieu Dussouillez, confronté comme tous les directeurs à la hausse des couts et qui cherchait un moyen de maintenir Idomeneo à l’affiche. Il aura peut-être trouvé la martingale. De passage à l’European Opera Prize en 2022, un inconnu pas même lauréat lui tape dans l’oeil (lui et son équipe ont depuis remporté l’édition 2023). Assistant de Damiano Michieletto à la Scala (Falstaff), Lorenzo Ponte, troisième dudit concours finalement, se voit confier une mise en espace. Le jeune italien réclame un peu, ouvre les placards des ateliers de l’Opéra de Nancy. S’il n’obtient pas un euro de plus, il pioche dans les accessoires et les éléments de décors de productions précédentes pour monter ce qui devient une mise en scène de fait en l’espace de quinze jours, et ce même si l’opéra continue de vendre le spectacle comme semi-scénique. On soupçonne même le sapin de Noël utilisé dans la production d’être celui placé dans l’entrée du bâtiment pendant la période des fêtes.

© Simon Gosselin

C’est tout bénef, comme on dit, et cela ne prend pas en compte l’intelligence de la proposition du jeune cost killer. Si ce ne sont plus les Dieux et le Destin qui harcèlent les hommes, qu’est-ce qui peut bien leur pourrir la vie ? Le crime et la culpabilité répond Lorenzo Ponte. En Crète, il trouve cette matière dans l’épouse d’Idomeneo, Meda, rayée de la littérature tel Carthage recouverte de sel. Mais au lieu d’asséner, il se contente de suggérer : la figurante qui l’incarne est présente à l’ouverture et pendant deux arias dont le premier d’Idomeneo, où le crime primordial est représenté et trouve de troublants échos dans le texte du livret. Les premières scènes, le mémorial funéraire d’Idomeneo disparu en mer, deviennent presque joyeuses, le père meurtrier et abusif n’est plus. Son retour déclenche la crise et réactive les traumas des uns et des autres, pendant qu’Arbace et le Grand-Prêtre concourent à sauver le patriarcat tutélaire. Elettra, qui s’y connait en famille problématique, devient ici la justicière par un tour de force aussi subtil que lisible, un peu comme Ortrud et Telramud en ce moment à la Bastille. Mais à la différence de Kirill Serebrennikov, qu’on voit rater scène après scène son fort parti pris, Lorenzo Ponte tient le cap de son angle et le déroule avec un art consommé du théâtre. L’utilisation des lumières et des noirs rehausse une scénographie faite des bouts de chandelle trouvés dans les placards de l’Opéra. Condamné à la simplicité, on trouve de la poésie dans les expédients les plus simples, à l’image d’Ilia et de son oiseau en cage que matérialise une poursuite. Seule la transposition dans l’Italie des années 1960, justifiée par le poids de l’Eglise en bras armé du patriarcat, nous a semblé trop appuyée.

Tristan, Manru et maintenant Idomeneo : l’orchestre de l’Opéra de Nancy confirme son excellence. D’autant que Jakob Lehmann lui fait prendre un train d’enfer au premier acte. Ces tempos uniformément rapides handicapent ses chanteurs. Ilia sonne comme Elettra, Idamante semble détaché et Elettra déboussolée. La battue tout autant que la lecture, plus classiques par la suite, permettront de mettre en valeur les solistes en fosse et sur le plateau. Les cuivres sont irréprochables et bien secondés par la petite harmonie, tous les pupitres de cordes s’équilibrent dans une élégance toute contrapuntique.

Le plateau vocal est à la fête. Certes Toby Spence, seul titulaire qui n’effectue pas une prise de rôle ce soir, vient à bout du rôle-titre au prix de vocalises glissantes et d’aigus au forceps, dans un timbre qui se blanchit en cours de soirée. On lui sait gré de maintenir une ligne élégante malgré les difficultés rencontrées. Louis Morvan aura convaincu tous les casteurs présents dans la salle avec son spectaculaire Neptune en coulisses. Léo Vermot-Desroches s’impose comme le plus mozartiens de tous : ligne, phrasé, contrôle du souffle époustouflant… son Arbace grimé en prêtre obscène tutoie l’idéal malgré la coupe de son deuxième air. Chez ces dames et passé donc ce premier acte express, Siobhan Stagg tisse un chant élégant où rien ne manque si ce n’est des couleurs plus contrastées pour donner toute la vie à son personnage, moins jeune première qu’il n’y parait. Amanda Woodbury, excellente actrice finit d’empocher la mise avec un dernier air techniquement parfait où la fureur de l’Atride point dans des aigus limpides et des staccati assassins. Héloïse Mas fait carton plein. Son bagage technique et son aisance scénique lui permettent de suivre au mieux les intentions du metteur en scène (prince infantilisé, finalement libéré) et surtout l’écriture et le riche portrait que Mozart lui a réservés. Enfin, les chœurs de l’Opéra national de Lorraine brillent tout du long par leur homogénéité et leur rondeur.

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Dramma per musica en trois actes (Munich 29 janvier 1781)

Musique de Wolfgang Amadeus Mozart – K.366

Livret de Giambattista Varesco

D’après Idoménée, livret d’Antoine Danchet (1712)

Nouvelle production Opéra de Lorraine en version semi-scénique

Détails

Mise en scène
Lorenzo Ponte

Costumes
Giulia Rossena

Lumière
Emanuele Agliati

Scénographie
Alice Benazzi

 

Idomeneo
Toby Spence

Idamante
Héloïse Mas

Ilia
Siobhan Stagg

Elettra
Amanda Woodbury

Arbace
Léo Vermot-Desroches

Gran Sacerdote
Wook Kang

Voce di Nettuno
Louis Morvan

Crétoises et Troyens
Inna Jeskova, Séverine Maquaire, Yongwoo Jung, Jinhyuck Kim

Méda
Rosabel Huguet

Orchestre et chœur de l’Opéra national de Lorrain

Direction musicale
Jakob Lehmann

 

Nancy, Opéra national de Lorraine, vendredi 29 septembre 2023, 20h

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