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STOCKHAUSEN, Sonntag aus Licht – Paris (Philharmonie)

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Spectacle
26 novembre 2023
Messe pour un autre temps

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra en cinq scènes et un adieu, pour dix voix solistes, une voix d’enfant, quatre instruments solistes, deux chœurs, deux orchestres, électronique et projection du son de Karlheinz Stockhausen

Création à l’Opéra de Cologne, les 9 et 10 avril 2011

Détails

Sonntag aus Licht

 

Scènes 1 et 2

 

Mise en espace d’après les indications de Karlheinz Stockhausen
Maxime Pascal, Ted Huffman

Projection sonore
Florent Derex

Réalisation informatique musicale
Augustin Muller
Romain Vuillet

Chef(fe)s de chant
Alphonse Cemin
Bianca Chillemi
Chae-Um Kim

Chef de chœur
Olivier Bardot
Gisèle Delgoulet
Zoé Fouray
Pierre-Louis de Laporte
Lucie Rueda
Titouan Sevic
Romain Vuillet
Alain Muller

Lumières
Bertrand Couderc

Vidéo
Pierre Martin-Oriol

Collaboration au mouvement
Jenny Ogilvie

Costumes
Pascale Lavandier

Accessoires
Marguerite Lantz

 

Soprano
Michiko Takahashi

Soprano
Marie Picaut

Mezzo-soprano
Emmanuelle Monier

Ténor
Hubert Mayer

Ténor
Josue Miranda

Basse
Florent Baffi

Synthétiseur
Haga Ratovo

 

Le Balcon

Orchestre de chambre de Paris

Chœur Stella Maris

 

Direction musicale
Maxime Pascal

Paris, Philharmonie, jeudi 16 novembre à 20h et lundi 20 novembre à 19h

Il y aurait tant à dire sur Licht, le cycle de sept opéras écrit par Karlheinz Stockhausen entre 1977 et 2003, et qui a quelque chose d’une tétralogie wagnérienne à la sauce XXe siècle. Sauf que ce ne sont pas les légendes nordiques qui inspirent la trame du récit mais le Livre d’Urantia (1955), un ouvrage spirituel dans lequel les récits bibliques ont été récrits à l’aune de découvertes sur le cosmos. Sonntag aus Licht (« Dimanche de lumière »), dernier opéra du cycle composé entre 1998 et 2003, était présenté en deux soirées à la Philharmonie de Paris par l’ensemble Le Balcon.

Écouter la musique de Stockhausen aujourd’hui est pour nous une expérience assez curieuse. Elle nous plonge dans une époque à la fois totalement dépassée et paradoxalement prospective, dans son esthétique, son formalisme, sa démesure. Sonntag aus Licht revêt une dimension particulièrement liturgique, où la mise en espace et le mouvement processionnel des interprètes, le caractère litanique du livret sous la forme d’un catalogue de phrases sobres et de mots simples, quelques fois poétiques, nous donnent l’impression d’assister à un rituel sectaire. L’expérience est aussi cosmique : les voix et les instruments spatialisés et amplifiés aux quatre coins de la salle, nappés d’un soupçon d’électronique, enveloppent le spectateur et le projettent quasi littéralement dans un autre espace-temps. Tout, absolument tout est rigoureusement écrit par le compositeur, jusqu’à la mise en espace de l’œuvre ; et pourtant, il y a cette impression étrange que des interstices de liberté se sont glissés à l’intérieur de la structure rythmique de la partition. D’un point de vue formel, c’est comme si Stockhausen nous disait que quelque chose d’autre pouvait se jouer au-delà ou à l’intérieur de la métrique. Mais il y a plus. Une dimension politique pourrait-on dire, en ceci que la hiérarchie conventionnelle entre les interprètes se trouve parfois ébranlée. Par exemple, le musicien instrumentiste devient soliste au même titre que le musicien chanteur et, situés sur un même pied d’égalité, ils vont jusqu’à entrer en dialogue ou se substituer l’un à l’autre, interprétant ainsi le même personnage. Dans la monumentalité de cette œuvre complexe, il est fascinant d’observer la manière dont opère la force du groupe, puisée dans la confiance et une sorte d’intuition collectives, indépendamment du rôle de coordination dévolue au chef d’orchestre. Mais en fin de compte, Sonntag aus Licht est surtout une expérience, avec tout ce que ce terme met de distance avec la dimension purement sensible, émotionnelle. C’est une musique qui s’adresse plus à l’esprit qu’au corps, comme en témoigne d’ailleurs la vision de l’amour qu’elle véhicule, dépourvue de chair, de toucher, de sensualité.

Paris, le 21 novembre 2023. Karlheinz Stockhausen / Sonntag aus Licht (scènes 3,4 et 5) ©Denis ALLARD / Philharmonie de Paris

Maxime Pascal, en maître de cérémonie et des horloges, dirige avec une implacable précision. Toute l’équipe du Balcon et de la Philharmonie avec lui a fait montre d’un professionnalisme à tout rompre dans le montage d’un projet de cette envergure. Et toutes les formations de musiciens et de chanteurs – Le Balcon, l’Orchestre de chambre de Paris, le Chœur Stella Maris, la Maîtrise de Paris ainsi que les élèves du Conservatoire national Supérieur de Musique de Paris – doivent être salués pour leur engagement, la qualité et la rigueur de leur travail dans cette véritable et impressionnante performance. Même louange du côté des solistes, en particulier Michiko Takahashi, soprano au timbre gourmand et dont la voix tutoie les sommets du registre aigu avec une incroyable aisance, à l’instar de Jenny Daviet, déjà très remarquée et remarquable dans Freitag aus Licht l’année passée, et à laquelle le charisme et la grâce donnent l’allure d’une actrice de cinéma. Beaucoup d’élégance aussi chez Hubert Mayer, un ténor à la voix techniquement très solide et parfaitement saine.

Il faut une grande confiance mais aussi un certain culot pour monter une œuvre telle que Licht, laquelle engage nombre de parties prenantes sur plusieurs années. Mais pour qui et pourquoi ? Qui s’intéresse (encore) à Stockhausen et qu’est-ce que Sonntag aus Licht apporte au monde ? Si l’exploit artistique peut nous laisser admiratifs, il n’en reste pas moins qu’une telle débauche de moyens peut nous laisser perplexes face au type de public auquel le spectacle est, par défaut, adressé. C’est-à-dire l’élite de l’élite. La niche de la niche. Des nostalgiques ou des amateurs de musique conceptuelle, une certaine bourgeoisie cultivée qui cherche à sortir de sa zone de confort, par curiosité – c’est notre cas – par goût peut-être, mais aussi par posture, parce que cela fait chic dans une époque qui a soif d’expériences plus que de profondeur. Il y a là comme un hiatus avec la manière dont il faudrait penser et produire des spectacles aujourd’hui, afin qu’ils demeurent porteurs de sens là où notre monde en est de moins en moins pourvu. Sonntag aus Licht ne serait-il pas une messe pour un autre temps ?

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Opéra en cinq scènes et un adieu, pour dix voix solistes, une voix d’enfant, quatre instruments solistes, deux chœurs, deux orchestres, électronique et projection du son de Karlheinz Stockhausen

Création à l’Opéra de Cologne, les 9 et 10 avril 2011

Détails

Sonntag aus Licht

 

Scènes 1 et 2

 

Mise en espace d’après les indications de Karlheinz Stockhausen
Maxime Pascal, Ted Huffman

Projection sonore
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Réalisation informatique musicale
Augustin Muller
Romain Vuillet

Chef(fe)s de chant
Alphonse Cemin
Bianca Chillemi
Chae-Um Kim

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Gisèle Delgoulet
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Collaboration au mouvement
Jenny Ogilvie

Costumes
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Soprano
Michiko Takahashi

Soprano
Marie Picaut

Mezzo-soprano
Emmanuelle Monier

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Ténor
Josue Miranda

Basse
Florent Baffi

Synthétiseur
Haga Ratovo

 

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Chœur Stella Maris

 

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