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VERDI, Nabucco – Marseille

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Spectacle
6 avril 2023
La ferveur était aussi dans la salle

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Opéra en quatre parties (Milan, Teatro alla Scala, 1842)

Musique de Giuseppe Verdi
Livret de Temistocle Solera
D’après Nabuchodonosor, drame d’Auguste Anicet-Bourgeois et Francis Cornu

Détails

Mise en scène
Jean-Christophe Mast
Assistante et Chorégraphie
Laurence Fanon
Assistant chorégraphie
Cyrille de Gonzalgue
Décors et costumes
Jérôme Bourdin
Lumières
Pascal Noël

Abigaille
Csilla Boross
Fenena
Marie Gautrot
Anna
Laurence Janot
Nabucco
Juan Jésus Rodriguez
Zaccaria
Simon Lim
Ismaël
Jean-Pierre Furlan
Abdallo
Jérémie Duffau
Le grand prêtre de Baal
Thomas Dear

Chœur de l’Opéra de Marseille
Chef de chœur
Emmanuel Trenque

Orchestre de l’Opéra de Marseille
Direction musicale
Paolo Arrivabeni

Marseille, dimanche 2 avril 2023, 14h30

Après vingt-trois années d’absence Nabucco revient à l’affiche de l’Opéra de Marseille et fait salle comble. Une salle extrêmement attentive, tout entière au bonheur de réentendre cette partition où se dessinent déjà les linéaments futurs de la personnalité de Verdi et où flottent encore de furtifs échos de la Semiramide de Rossini ou de l’Anna Bolena de Donizetti. Bonheur dispensé par un orchestre en grande forme, dont Paolo Arrivabeni tire le meilleur, dosant parfaitement les éclats et obtenant énergie, clarté et transparence.  Certes, la lenteur du début de l’ouverture semble excessive, on frise la pesanteur, mais l’accélération qui suit dissipe le doute et on s’abandonne avec délices aux rythmes, péremptoires, tranchants ou berceurs, comme on savourera les ensembles

Production de l’Opéra de Saint-Etienne, ce spectacle a pour lui une conception scénique qui va à l’essentiel. Des différents lieux prévus par le livret, on ne verra rien puisque l’action se déroule dans un même dispositif scénique. Jérôme Bourdin, qui l’a conçu, a installé des piliers massifs en fond de scène ; ils s’élancent et disparaissent dans les hauteurs, suggérant puissance et mystère, tour à tour Temple de Jérusalem et palais de Nabucco à Babylone. Le parallélépipède imposant d’où Zaccaria s’adresse aux Hébreux au premier acte deviendra le trône surélevé à Babylone, les transitions étant suggérées par les éclairages très efficaces de Pascal Noël. Pas de jardins suspendus donc, mais ce qu’on perd en pittoresque on le gagne en rapidité puisque aucun précipité n’est nécessaire, et l’intensité dramatique n’est jamais rompue. Signés eux aussi Jérôme Bourdin les costumes ne nous ont pas entièrement conquis : autant ceux des Hébreux ont la séduction du tombé des plissés, autant les armures des Assyriens les tirent vers les mangas, impression que les danses ont renforcée.

Zaccaria (Simon Lim) et Ismaele (Jean-Pierre Furlan) © Christian Dresse

La mise en scène de Jean-Christophe Mast ne cherche pas midi à quatorze heures ; si elle a éveillé le souvenir de celle de Hugo de Ana pour sa Semiramide de Pesaro – le défilé des porteurs de lance – si elle en rajoute quant au personnage d’Abigaille, qui égorge trois jeunes filles juives, si à Babylone elle fait émerger les Hébreux des dessous de scène pour suggérer des geôles souterraines alors qu’ils semblent aller et venir entre dessus et dessous sans contrainte apparente, ces remarques sont des vétilles car la direction d’acteurs est satisfaisante. L’éveil de Nabucco au sortir de son cauchemar est un moment particulièrement réussi.

Comme l’orchestre, le plateau est très séduisant, en raison de la générosité des interprètes. Ainsi Laurence Janot ne s’épargne pas pour donner au rôle secondaire d’Anna une présence scénique et vocale qui se remarque. Plus sobres Thomas Dear, spectaculaire Grand prêtre de Baal et Jérémy Duffau, le dévoué Abdallo, sont impeccables.

Le couple Ismaël- Fenena est défendu par Jean-Pierre-Furlan et Marie Gautrot. Il s’efforce de donner de l’épaisseur au personnage de sa voix claironnante mais semble parfois à la peine, avec un vibrato contenu mais importun. Elle assure avec élégance ce rôle ingrat, car en dehors de son effusion au quatrième acte Verdi a sacrifié la bonne fille à l’exaltation de la mauvaise.

© Christian Dresse

Mauvaise, Abigaille ? Si désireuse d’être aimée, elle est toujours et encore frustrée par cette cadette que leur père Nabucco et l’ambassadeur hébreu lui préfèrent. La voilà menacée de déchoir de ce rang qui constituait sa raison d’être si sa naissance illégitime est révélée. Quand elle apparaît sur scène, c’est gonflée de toutes ses rancœurs, prête à se venger de tous les dédains passés. C’est l’amertume de ce vécu qui s’exhale dans sa voix, avec une violence à peine entrecoupée par l’évocation nostalgique de ce qui aurait pu être. Ce prisme de sentiments donne au personnage une richesse que l’interprète doit restituer. Mission accomplie pour Csilla Boros, Abigaille désormais chevronnée, qui affronte les écueils du rôle avec l’impétuosité et toute l’étendue vocale requises, mais qui sait nuancer à propos et dont la présence scénique s’accorde sans histrionisme aux émotions à transmettre.

Son adversaire principal est le Grand Prêtre des Hébreux, Zaccaria. Référence pour ses ouailles, qu’il les exhorte à la confiance en Dieu, qu’il ranime leur espoir durant leur captivité, il doit incarner le modèle, la tranquillité foncière de celui dont la foi est inébranlable. Cela réclame un interprète dont la voix fasse résonner les convictions du personnage, aussi solides que la voix est profonde. A cet égard celle de Simon Lim ne laisse rien à désirer, et tant son étendue que sa vigueur sont bien celles attendues.

Désormais favori du public marseillais Juan Jésus Rodriguez n’est plus une divine surprise mais reste une valeur très sûre et comble les attentes : son Nabucco nuancé évite les outrances et compose un personnage complexe, d’apparence forte mais facile à manipuler. La voix est ferme comme il faut pour le guerrier conquérant, brutale envers la présomptueuse bâtarde, implorante à l’égard de ce Dieu dont la puissance l’a éprouvé.

Dernier atout de ces représentations, le chœur de l’Opéra, magnifiquement préparé par Emmanuel Trenque, subjugue dès la première scène et cette impression perdurera. A cet égard le public a été remarquable de tenue lui aussi : les applaudissements qui ont ponctué la représentation n’ont jamais empiété sur les dernières notes. Pas de téléphone intempestif, pas de toux en cascades, en ce dimanche des Rameaux la ferveur était aussi dans la salle !

Mort d’Abigaille (Juan Jésus Rodriguez et Csilla Boros) © Christian Dresse

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Opéra en quatre parties (Milan, Teatro alla Scala, 1842)

Musique de Giuseppe Verdi
Livret de Temistocle Solera
D’après Nabuchodonosor, drame d’Auguste Anicet-Bourgeois et Francis Cornu

Détails

Mise en scène
Jean-Christophe Mast
Assistante et Chorégraphie
Laurence Fanon
Assistant chorégraphie
Cyrille de Gonzalgue
Décors et costumes
Jérôme Bourdin
Lumières
Pascal Noël

Abigaille
Csilla Boross
Fenena
Marie Gautrot
Anna
Laurence Janot
Nabucco
Juan Jésus Rodriguez
Zaccaria
Simon Lim
Ismaël
Jean-Pierre Furlan
Abdallo
Jérémie Duffau
Le grand prêtre de Baal
Thomas Dear

Chœur de l’Opéra de Marseille
Chef de chœur
Emmanuel Trenque

Orchestre de l’Opéra de Marseille
Direction musicale
Paolo Arrivabeni

Marseille, dimanche 2 avril 2023, 14h30

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