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WAGNER, Tristan und Isolde – Caen

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Spectacle
4 avril 2023
Beaucoup de mots pour rien

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Tristan und Isolde
Opéra en trois actes de Richard Wagner
Livret du compositeur
Création à Munich le 10 juin 1865 (Théâtre royal de la cour de Bavière)
Production théâtre national de Lorraine, coproduction Opéra de Lille et théâtre de Caen

Détails

Mise en scène et textes additionnels
Tiago Rodrigues
Décors
Fernando Ribeiro
Costumes
José António Tenente
Lumières
Rui Monteiro

 

Tristan
Samuel Sakker
Isolde
Dorothea Röschmann
Brangäne
Aude Extrémo
Kurwenal
Scott Hendricks
Le roi Marke
Jongmin Park
Melot
Peter Brathwaite
Un berger – un jeune matelot
Alexander Robin Baker
Un timonier
Yong Kim
Danseurs-chorégraphes
Sofia Dias et Vitor Roriz

Orchestre et Chœur de l’Opéra national de Lorraine
Direction musicale
Leo Hussain

Caen, Théâtre, vendredi 31 mars 2023, 19h

 

Suite de la tournée du Tristan und Isolde créé en janvier à Nancy. L’accueil mitigé des spectateurs (voir le compte rendu de Yannick Boussaert) ne semble pas avoir entraîné des modifications. La grande trouvaille du metteur en scène Tiago Rodrigues, pour être sûr de faire parler de lui, est d’avoir remplacé les surtitres donnant le texte de Wagner et sa traduction, par des panneaux manipulés sur scène avec grâce et efficacité par Sofia Dias et Vitor Roriz, et de plus reproduits également sur le surtitreur. L’emprise visuelle de ces grands panneaux est si importante que c’est donc Tristan et Yseult de Tiago Rodrigues que l’on nous impose de « voir », et non l’œuvre de Wagner (néanmoins présente grâce à l’orchestre et aux chanteurs). Mais surtout quelle indigence de propos, quel langage artificiel, pédant, pompeux et prétentieux, que de contresens et de stupidités dans un français souvent approximatif. Allant même jusqu’à qualifier Tristan d’« homme triste », sans expliquer pour autant s’il est triste du fait qu’il se nomme Tristan, ou si on l’a nommé Tristan du fait qu’il était triste ! Chacun des personnages est ainsi affublé de même d’un qualificatif superfétatoire dont la moindre des qualités est de convaincre le spectateur qu’il est suffisamment stupide pour avoir besoin d’une aide à la compréhension de ce qui se passe. Jusqu’à semer de manière incongrue l’hilarité dans la salle en soulignant que l’opéra était chanté en allemand.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Tristan_et_Isolde%C2%A9JeanLouisFernandez-113.jpg.Une épée © Jean-Louis Fernandez

En tant que support promotionnel concernant Tiago Rodrigues et sa première mise en scène d’opéra, je doute donc que son idée soit très bonne. Pour le reste, cette accumulation de panneaux (impossibles à compter tant leur nombre est considérable) amène dès le début chez le spectateur une sensation d’overdose (15 minutes montre en main de défilé de panneaux avant que le chef ne lève sa baguette !) Les personnages se trucident à coup de panneaux à défaut d’épées (mais le mot « épée » est inscrit dessus pour que les choses soient bien claires). Et que dire de la sublime scène finale de la mort d’Isolde, où la malheureuse est contrainte de chanter alors qu’un ballet de panneaux la presse de tous côtés et détourne l’attention de son interprétation. Donc en conclusion de cette situation cataclysmique, encore un opéra à regarder les yeux fermés, mais ça, on en a maintenant pris l’habitude.

D’autant que le décor a de la grandeur mais n’aide en rien à accompagner l’action. Celle-ci ne se déroule pas dans « une » archive, comme on veut nous l’imposer, mais dans une salle d’archives. Lesdites archives étant bien sûr les fameux panneaux qui vont petit à petit dégarnir les rayonnages (on ne peut s’empêcher de penser au fil de l’action aux malheureux qui vont devoir les remettre en ordre pour la représentation suivante !). Donc pas de navire au premier acte, mais fort curieusement des plantes vertes au second acte, ce qui est quand même un comble dans un dépôt d’archives où l’on sait que les organismes vivants, friands de verdure, sont totalement proscrits.

Reste fort heureusement la partie musicale, dont Yannick Boussaert a parfaitement évoqué la qualité dans son compte rendu d’une des représentations données à Nancy en janvier dernier. Je ne reprendrai donc pas ses louanges à l’égard du chef Leo Hussain et de l’orchestre de l’Opéra national de Lorraine, malgré quelques petits problèmes au niveau des cuivres. Et un fort bémol concernant les chœurs de l’Opéra national de Lorraine, dont personne ne semble avoir pensé à adapter le niveau sonore à la salle de Caen, au point qu’ils en arrivent à couvrir l’orchestre !

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Tristan_et_Isolde%C2%A9JeanLouisFernandez-153.jpg.La mort d’Isolde © Jean-Louis Fernandez

De leur côté, les solistes ont certainement muri leur interprétation depuis la création du spectacle, et nombre de remarques ont perdu de leur acuité. À commencer par l’Isolde de Dorothea Röschmann, qui n’a certes toujours pas de réserve supérieure pour ses contre-uts, mais les donne quand même de manière correcte. Et si son médium demeure souvent incertain, lui imposant parfois des savonnages hasardeux, elle emporte l’adhésion par sa projection efficace dans les moments les plus attendus. Et si elle est particulièrement intéressante dans les moments de véhémence, elle n’en est que plus émouvante dans les moments de tendresse. Sa mort, malgré les fameux panneaux, est à cet égard tout à fait impressionnante.

Son Tristan, Samuel Sakker, qui chantait – et fort bien – le rôle à Gand quelques jours avant, semble avoir du mal à passer d’une production à l’autre. Il reste en tous cas trop en retrait au début de sa prestation, et sa voix, curieusement engorgée, ne se délivre qu’au milieu de son duo avec Isolde. À partir de là, il n’a plus de mal à imposer vocalement son personnage torturé, malgré la mise en scène qui ne favorise guère ni regards ni échanges amoureux. S’est-il réservé pour la fin ? Son agonie, en tous cas, est déchirante et la voix alors splendide.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Tristan_et_Isolde%C2%A9JeanLouisFernandez-142-1.jpg.La mort de Tristan © Jean-Louis Fernandez

Scott Hendricks en Kurwenal est particulièrement en situation, encore que le premier acte le trouve quelque peu en retrait. Mais au troisième, il trouve vraiment le personnage et la voix qui va avec. Il rejoint à l’applaudimètre final Jongmin Park (un roi Marke à la voix profonde mais au jeu semblant peu concerné), Aude Extrémo, une magnifique Brangäne attentive et chaleureuse, dont la belle voix fait merveille, notamment dans les appels à la nuit, et Alexandre Robin Baker à la jolie voix claire et précise (un berger et un jeune matelot).

 

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Opéra en trois actes de Richard Wagner
Livret du compositeur
Création à Munich le 10 juin 1865 (Théâtre royal de la cour de Bavière)
Production théâtre national de Lorraine, coproduction Opéra de Lille et théâtre de Caen

Détails

Mise en scène et textes additionnels
Tiago Rodrigues
Décors
Fernando Ribeiro
Costumes
José António Tenente
Lumières
Rui Monteiro

 

Tristan
Samuel Sakker
Isolde
Dorothea Röschmann
Brangäne
Aude Extrémo
Kurwenal
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Caen, Théâtre, vendredi 31 mars 2023, 19h

 

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