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31 décembre 2015

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Retour, mois par mois, sur les temps forts de l’année lyrique qui vient de s’écouler. Ne voulant et ne pouvant prétendre à l’exhaustivité, cette sélection s’appuie sur les articles les plus lus en 2015.


Janvier : Frappé par ce qui s’avèrera n’être qu’une première vague d’attentats à Paris, le monde musical se proclame « Charlie », exception faite de Tel Aviv où Frédéric Chaslin se voit refuser par la direction de l’Opéra d’Israël de rendre hommage aux victimes. A la Bastille, le Chœur interprète « Va pensiero » avant la reprise discutable de Don Giovanni réglée par Michael Haneke. Dans Maria Stuarda, Barcelone sacre Joyce DiDonato reine du belcanto. Véronique Gens chante Marie de Gonzague dans la recréation de Cinq-Mars à Versailles tout en déplorant que les français n’apprécient pas davantage la musique française. La Philharmonie de Paris n’a pas encore ouvert ses portes que déjà le collectif Colère Lyrique s’insurge contre l’accueil en résidence d’un ensemble amateur dont les 220 chanteurs, non payés, assureront gratuitement la quasi intégralité de la saison lyrique, au détriment des choristes professionnels.

Février : Jonas Kaufmann, fatigué, boude les Victoires de la musique classique. Lors de la représentation du dyptique Iolanta / Le Château de Barbe-bleue à New York, des manifestants s’indignent des prétendues sympathies d’Anna Netrebko et de Valery Gergiev pour Vladimir Poutine. Soumis par BFM Business à une écoute à l’aveugle, Stéphane Lissner se prend les pieds dans le tapis, ce qui n’empêche pas les grands chanteurs de revenir nombreux sur la scène de l’Opéra de Paris. Avec le rôle-titre d’Alcina à Bruxelles, Sandrine Piau entre dans la légende.

Mars : Paris bruit d’un vent mauvais. La mairie refuse la pose officielle d’une plaque en hommage à Henri Dutilleux sur l’Ile Saint-Louis. Englué dans un des plus longs mouvements sociaux que Radio France ait connu, Mathieu Gallet envisagerait la fermeture de France Musique et, à la Bastille, Jean-Romain Vesperini ne parvient pas à rafraîchir Faust initialement mis en scène par Jean-Louis Martinoty. Mais Le Cid interprété par Roberto Alagna effectue un retour en fanfare sur la scène du Palais Garnier et à Rome, Aida avec Jonas Kaufmann et Anja Harteros remporte un succès pharaonique.

Avril : A Salzbourg, Cavalleria rusticana prend l’avantage sur I pagliacci : c’est en Turiddu que Jonas Kaufmann convainc le plus. Joyce DiDonato, Charles Castronovo, Ludovic Tézier : l’affiche de La Damnation de Faust proposée par Baden-Baden tient ses promesses. Michel Fau réinvente Dardanus à Bordeaux et Sabine Devieilhe à Tourcoing réussit sa première Mélisande.

Mai : Le Roi Arthus d’Ernest Chausson est enfin représenté à l’Opéra de Paris, plus d’un siècle après sa création à Bruxelles. Macbeth mis en scène par Mario Martone au Théâtre des Champs-Elysées fait son cinéma. Le quotidien belge Le Soir dézingue le concours Reine Elisabeth. Dans le film Youth, de Paolo Sorrentino présenté à Cannes, Sumi Jo joue son propre rôle. Avec Cavalleria rusticana et I pagliacci à Bilbao, l’incroyable Gregory Kunde ajoute deux nouveaux rôles à un répertoire déjà conséquent.

Juin : Anna Netrebko campe une Mimi miraculeuse dans l’ultime reprise de La Bohème mise en scène par John Copley à Londres. Trop belle Hélène au Châtelet pour un spectacle traîne-patins dont elle est le principal intérêt, Gaëlle Arquez avoue fonctionner « à coups de claques artistiques ». Les Mousquetaires au couvent referment les huit saisons du mandat de Jérôme Deschamps à la tête de l’Opéra Comique. Dmitri Hvorostovsky annonce qu’il souffre d’une tumeur cérébrale et annule tous ses engagements. Le décès de Franck Ferrari finit d’assombrir les derniers jours du mois.

Juillet : Marc Minkowski est nommé à la tête de l’Opéra de Bordeaux. La polémique enfle autour de Guillaume Tell mis en scène par Damiano Michieletto à Londres. On apprend la mort de Jon Vickers, interprète légendaire de Don José dans Carmen, le soir-même où un autre ténor d’ores et déjà de légende, Jonas Kaufmann, triomphe aux Chorégies d’Orange dans ce même opéra. Toujours à Orange, des enfants désœuvrés jettent sans raison des pierres sur les musiciens durant une répétition du Trouvère. Plus au sud, à Aix-en-Provence, Katie Mitchell oblige Philippe Jaroussky et Patricia Petibon à des jeux sadomasochistes dans une Alcina qui s’impose comme un des temps forts du festival.

Août : Après un Trouvère qui divise public et critique, Roberto Alagna annonce qu’il ne chantera plus dans des productions scéniques à Orange. A Salzbourg, Christopher Maltman enlève le bas dans Iphigénie en Tauride aux côtés de Cecilia Bartoli et Werther avec Piotr Beczala et Angela Gheorghiu laisse sur sa faim. Edita Gruberova continue de faire délirer le public de La Scala. Alain Atinoglu est nommé directeur musical de La Monnaie. Patricia Petibon épouse le violoniste Didier Lockwood.

Septembre : Jonas Kaufmann frappe fort avec, simultanément ou presque, la sortie de son Puccini Album et l’interprétation de Radamès dans Aida sur la scène du Bayerische Staatsoper. Yes, le premier enregistrement de Julie Fuchs chez Deutsche Grammophon est une invitation à la bonne humeur mais rien n’y fait, Paris continue de faire grise mine : la Municipalité, en la personne du maire du 4e arrondissement, Christophe Girard, finit de se discréditer dans l’affaire Dutilleux ; une grève perturbe le début de saison de l’Opéra et Anja Harteros annonce qu’elle ne chantera pas Ariadne au Théâtre des Champs-Elysées. A Tours, Jean-Yves Ossonce fait sensation en annonçant sa démission des fonctions de directeur du Grand Théâtre et de chef de l’Orchestre symphonique Région Centre-Val de Loire-Tours, deux postes qu’il occupait respectivement depuis 16 et 20 ans.

Octobre : Une décision de la Cour d’appel de Paris astreint BelAir Classiques à retirer de la venter les DVD et Blu-Ray de Dialogues des carmélites mis en scène par Dmitri Tcherniakov. Ce jugement lance un nouveau débat sur la liberté d’expression. René Pape et Joseph Calleja font la paire dans Mefistofele à Munich. Pour sa mise en scène de Moses und Aron à la Bastille, en lieu et place du veau d’or, Romeo Castellucci  fait appel à Easy Rider, le bœuf charolais désormais le plus connu de la Planète. On suppose que le cachet faramineux de l’animal – 5000€ par représentation – fera grincer des dents. En fait, ce ne sont pas les contribuables qui montent sur leurs grands chevaux mais les amis des bêtes. Malgré un communiqué de l’Opéra de Paris voulu rassurant, une pétition est adressée à Fleur Pellerin, qui n’y changera rien. Pendant ce temps, de l’autre côté de l’Atlantique, Sonya Yoncheva devient la nouvelle coqueluche du Metropolitan Opera mais, c’est Dmitri Hvorostovsky que les musiciens accueillent par  une pluie de roses blanches le soir de son retour sur la première scène lyrique newyorkaise.

Novembre : L’affaire du bœuf charolais n’est pas terminée qu’un nouveau scandale vient ébranler l’Opéra de Paris. La direction en retirant les cloisons des loges du Palais Garnier provoque un raz-de-marée de protestations. Même Hugues Gall sort de sa réserve. La pétition lancée par Sylvain Fort dépasse les 30.000 signatures. La polémique porte à la fois sur le fond – dans quelle mesure peut-on altérer l’intégrité du patrimoine ? – et sur la forme – les travaux ont été entrepris sans autorisation officielle, intervenue in extremis avant présentation d’un référé devant le tribunal administratif. Depuis, on a appris que les cloisons d’origine avaient été détruites. Les procédures judiciaires poursuivent leur cours. Rigoletto à Toulouse marque le retour sur scène de Ludovic Tézier après plusieurs mois d’absence. Une série d’attentats sans précédents à Paris entraîne la fermeture des salles de spectacle et notamment l’annulation de la trop rare Zelmira de Rossini en concert au Théâtre des Champs-Elysées. La mort du metteur en scène Luc Bondy, à l’âge de 67 ans, achève de mettre le mois en berne.

Décembre : Onze minutes d’applaudissements le soir de la Saint-Ambroise à La Scala saluent l’interprétation de Giovanna d’Arco par Anna Netrebko. Le retour de Jonas Kaufmann à l’Opéra de Paris dans La Damnation de Faust est gâché par la mise en scène d’Alvis Hermanis, chahutée comme rarement chaque soir. Avec Fauteuils d’orchestre, Anne Sinclair ramène l’opéra à la télévision à une heure de grande écoute. Patrizia Ciofi chante ce qu’elle annonce être sa dernière Traviata à Strasbourg. Dans ce même rôle de Violetta à Berlin, Sonya Yoncheva donne « le grand frisson ». Le Roi Carotte d’Offenbach à Lyon referme l’année sur un salutaire éclat de rire.

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